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LES PAYS DE L'AMBRE
Cet été 2024, nous avons effectué un grand voyage qui nous a conduit en Lituanie, Lettonie et Estonie, les trajets aller et retour nous ayant permis de compléter notre connaissance de la Pologne dont nous avions visité la partie sud en 2018.
Lorsqu’on roule sur l’autoroute A 9 qui passe à Montpellier, on double beaucoup de semi-remorques allant vers l’Espagne ou en revenant. J’avais remarqué que certains d’entre eux étaient immatriculés LT, LV ou EST, le marquage des pays baltes, et je me disais que s’ils pouvaient venir jusque dans le sud de la France avec un camion de 45 T, il n’y avait aucune raison pour que je ne puisse pas aller chez eux avec ma voiture.
J’ai donc préparé un voyage pour aller dans ces lointains pays en profitant des trajets aller et retour pour visiter les parties de la Pologne que nous ne connaissions pas, la région des Sudètes, les grandes plaines centrales, la côte de la mer Baltique et les villes de Wrocław, Czestochowa, Lublin, Gdańsk, Poznań et la capitale Warszawa.
Nous avions déjà parcouru une partie de la Pologne en 2018 et nous avions beaucoup aimé ce pays, ses belles villes jeunes et animées, ses campagnes tranquilles et ses sites magnifiques. Impression confirmée cette année dans les grandes villes que sont Wroclaw, Varsovie et Gdansk et dans l’ensemble du pays.
Les deux jours passés dans les montagnes de la région des Sudètes furent très agréables.
Nous avons été marqués par la visite de la tanière du loup, par le souvenir du grand Copernic à Frombork et les incroyables cathédrales visitées ici et là.
La visite de Varsovie nous a fait prendre conscience du traumatisme provoqué par les immenses destructions de la 2° guerre mondiale et par l’épisode du ghetto suivi de l’extermination de la très importante population juive. Les monuments, les mémoriaux, les musées sont nombreux. Nous n’en avons visité qu’un à Varsovie et nous n’avons pas voulu revoir ailleurs le témoignage des horreurs qui se sont déroulées ici dans les années 40.
Les pays baltes sont constitués de 3 pays, la Lituanie, la Lettonie et l’Estonie, les deux premiers étant assez semblables et tournés vers la Pologne tandis que l’Estonie se rapproche de la Finlande par sa culture, son origine et sa langue.
Nous avons découvert des pays agréables où il fait bon vivre, avec une population jeune, des villes tranquilles et belles, un niveau de vie aussi élevé que chez nous avec notamment un parc automobile remarquable. Le nombre de voitures haut de gamme, allemandes, suédoises et asiatiques, est impressionnant.
Sans entrer dans le détail de leur histoire compliquée, on retiendra la partie la plus récente. Coincés entre deux puissances totalitaires, l’Allemagne nazie et l’Union soviétique, ils furent envahis et occupés par l’Union Soviétique en juin 1940 puis, après 3 ans d’occupation par les troupes allemandes de l’opération Barbarossa, ils furent annexés de force à l’Union Soviétique et devinrent des républiques socialistes soviétiques. Ce fut une période terrible.
Officiellement 605 000 baltes furent tués ou déportés, remplacés par plus de 700 000 Russes. L’obligation d’utiliser la langue russe et l’interdiction des langues baltes, de la pratique de la religion et des coutumes locales, la suppression de la liberté d’expression, le contrôle étroit des médias, l’endoctrinement des enfants, la surveillance des populations par les diverses polices politiques et la peur des dénonciations devinrent le quotidien des Baltes qui virent aussi les bases militaires russes se multiplier sur leur territoire. Ce cauchemar dura 47 ans jusqu’à l’obtention de l’indépendance en 1991 au moment de la dissolution de l’URSS.
C’est certainement avec un grand soulagement que les trois pays ont adhéré à l’Union Européenne et à l’OTAN.
C’est le sentiment que l’on éprouve en visitant ces trois pays. Dans les capitales, des musées retracent avec plus ou moins de mise en scène ce que les Baltes ont vécu et un peu partout on trouve des monuments commémorant des massacres de villages entiers ou la découverte de fosses communes.
Inutile de dire que les Baltes sont assez inquiets de ce qui se passe en Ukraine et qu’ils affichent leur soutien intangible à ce pays. Le sentiment de fierté nationale est très fort et pratiquement chaque maison arbore le drapeau national. On voit aussi souvent flotter le drapeau de l’UE et, plus étonnant encore, celui de l’OTAN au fronton de bâtiments publics et même de quelques maisons particulières.
J 1 - Jeudi 20 juin - MTPL - Grenoble 317 km
C’est le grand départ pour 37 jours de voyage.
Avant de partir, j'ai collé sur la voiture les drapeaux des pays que nous allons visiter.
Malgré la pluie et l’intense circulation sur l’A9 et l’A7, le trajet se déroule bien. Nous quittons l’autoroute après Romans-sur-Isère pour traverser le Vercors. J’ai prévu de monter par les Grands Goulets mais des travaux m’obligent à emprunter une déviation qui passe par Herbouilly. Nous devons nous contenter des Petits Goulets, ses tunnels et ses hautes falaises calcaires.
C’est une belle route qui traverse de magnifiques forêts de sapins et de hêtres. Le paysage est magnifique malgré les averses.
Pour déjeuner nous nous arrêtons à la station de ski de fond d’Herbouilly où un auvent nous protège de la pluie.
Un peu plus haut, une éclaircie nous permet d’admirer la magnifique prairie d’Herbouilly au centre de laquelle se dressent les ruines d’une ancienne ferme qui avait servi de PC à un groupe de maquisards. Mais lors de leur offensive, les troupes allemandes détruisirent et brûlèrent la ferme. Le Vercors a été un haut lieu de la résistance pendant la 2° guerre mondiale et on trouve aujourd’hui de nombreux monuments rappelant certains épisodes de ce combat qui, faute de soutien extérieur, se termina par le massacre des résistants mais aussi de la population qui aidait les maquis.
Nous nous arrêtons quelques kilomètres plus loin devant un mémorial élevé à la mémoire des maquisards du Vercors. Ceux-ci appartenaient au 6° Bataillon de Chasseurs Alpins, unité dans laquelle j’ai servi pendant 8 ans, comme lieutenant et capitaine.
En contrebas de la route, se trouvent les restes calcinés du petit village de Valchevrière où était installé un camp de maquisards. Lors de leur offensive les 22 et 23 juillet 1944, les troupes allemandes se heurtèrent aux résistants. Dépassés en nombre, ils furent tous tués et le village fut incendié. Seule subsiste la chapelle restée intacte.
Nous passons Villard-de-Lans, Lans-en-Vercors et Saint-Nizier-du-Moucherotte. Nous sommes en terrain connu puisque nous avons habité à Grenoble de 1976 à 1984. La route passe près des fameux rochers des Trois Pucelles et dégringole jusque dans la banlieue de Grenoble, à Seyssinet-Pariset, où nous avions habité un certain temps.
Puis c’est Grenoble et nous arrivons à l’adresse où habite notre fils.
La voiture bien à l’abri dans un parking fermé, nous pouvons partir à la redécouverte de la ville en compagnie de Christelle. Grenoble s’est bien modernisée avec des lignes de tramway, un centre-ville entièrement piétonnier et quelques belles fontaines.
Nos pas nous conduisent sur la place Saint-André bordée par la façade du Palais de Justice et où se dresse une statue de Bayard.
Nous arrivons jusqu’au quai au bord de l’Isère. La rivière est gonflée et l’eau est boueuse. En fond de tableau, l'éperon de la Dent de Crolles se détache sur le ciel gris.
De l’autre côté de l'eau, les maisons se serrent au pied du massif montagneux sur lequel ont été construites les fortifications de la Bastille. On y accède par les célèbres "œufs" qui étaient tombés en panne le jour de leur inauguration le 18 septembre 1976 !
Nous passons une soirée agréable avec nos enfants qui n’habitent à Grenoble que depuis peu. Ils en ont eu assez de la région parisienne et apprécient de se retrouver au milieu des montagnes.
J 2 - Vendredi 21 juin - Grenoble - Schwäbisch Hall (DE) 750 km
C’est une grosse journée de roulage. Nous quittons Olivier et Christelle et récupérons la voiture au parking. Il est déjà 9h30 quand nous démarrons.Après Lyon, le temps se gâte. Il pleut de plus en plus fort. Les trombes d’eau nous obligent à rouler au pas tellement la visibilité est mauvaise, aggravée par les embruns soulevés par les camions.
Heureusement la pluie cesse aux alentours de Besançon et quand nous faisons la halte pique-nique un peu après Belfort, le soleil est revenu.
Nous passons Mulhouse, entrons en Allemagne et arrivons sur l’autoroute A 5 complètement bloquée à cause d’un accident. Une bonne demi-heure est nécessaire pour que la circulation reprenne normalement.
On remonte la vallée du Rhin sous le soleil jusqu’au nord de Karlsruhe, bifurquons sur l’A 6 et passons Heilbronn. Schwäbisch Hall n’est plus très loin.
Le Landhotel Steigenhaus est en pleine campagne, 3 kilomètres avant la ville. Il est 18h quand nous arrivons dans cet endroit bien agréable et très confortable où nous passons une soirée tranquille.
J 3 - Samedi 22 juin - Schwäbisch Hall (DE) - KARPACZ (PL) 594 km
Nous reprenons l’autoroute vers Nürnberg sous un beau ciel bleu mais au lieu de suivre le trajet que j’avais prévu via Chemnitz, Dresde et Görlitz, j’ai accepté la proposition du GPS de passer par la République Tchèque car le trajet est plus court et les autoroutes moins encombrées.
Après avoir contourné Prague, nous continuons vers Hradec Králové et Trutnov.
Nous nous arrêtons dans le petit village de Mladé Buky pour aller voir l’église qui domine le paysage car nous avons remarqué son clocher à bulbe. Elle fut dédiée à Sainte Catherine d’Alexandrie. Nous en profitons pour nous promener dans l’agréable cimetière où les tombes sont éparpillées dans une grande prairie plantée de magnifiques hêtres.
À côté, se dresse un monument aux morts commémorant les nombreux morts de la commune pendant la première guerre mondiale. Une plaque rappelle les impressionnantes pertes subies par le pays.
La route suit une vallée aux pentes couvertes de belles forêts qui pénètre à l’intérieur des Karkonosze, les monts des géants, qui séparent la République Tchèque de la Pologne, puis grimpe jusqu’au col frontière. Nous voici en Pologne.
De nombreux chemins de randonnée s’y croisent et nous rencontrons de nombreux marcheurs.
Après une longue descente sur les pentes boisées, nous arrivons à Karpacz, l’étape du jour.
Nous sommes en pleine région des Sudètes, une zone montagneuse et boisée qui s’étend à cheval sur la frontière. Une région très convoitée au fil de l’histoire qui connut la domination des Habsbourg puis des Prussiens avant de devenir tchèque après la 1° guerre mondiale et d’être finalement annexée par Hitler en 1938.
Aujourd’hui, on peut y profiter de ses forêts et de son calme.
Quant à Karpacz, c’est une grosse station climatique très touristique située au pied du Śnieżka, point culminant des Karkonosze, qui culmine à 1602 m d’altitude. Au milieu des bois de pins et de bouleaux, les jolis chalets de montagne côtoient petits immeubles modernes et installations sportives de toutes sortes.
Nous logeons dans une chambre d’hôtes installée dans une grande maison-chalet au bout d’une impasse au milieu des bois. Un endroit tranquille.
Etonnamment, la patronne est espagnole ce qui nous permet de dialoguer dans sa langue, à la grande joie de Margarita, notre hôte. Nous disposons d’une grande chambre avec une terrasse donnant sur la forêt.
Nous allons faire des courses dans un petit supermarché des environs puis, en voiture allons voir l’attraction du lieu, Kościół Wang, une église en bois debout construite en pin au nord de la Norvège au 12° siècle. Elle dût taper dans l’œil du roi de Prusse Frédéric-Guillaume IV, puisqu’il l’acheta et l’expédia dans cette petite ville en 1841 mais ce n’est qu’après de multiples péripéties qu’elle arriva à destination en 1844.
Mais nous y retournerons le lendemain pour la voir éclairée par le soleil et, s’il n’est pas trop tard, pour la visiter.
De retour "chez nous", Margarita nous laisse utiliser sa cuisine de professionnelle pour préparer notre repas.
J 4 - Dimanche 23 juin - KARPACZ (PL)
Le temps est resté beau.La journée est consacrée à une randonnée jusqu’au Śnieżka dont le sommet est couronné d’une station météorologique qui ressemble un peu à une soucoupe volante.
Nous prenons le télésiège qui nous emmène à mi-pente sur un ressaut appelé Kopa. À partir de là, c’est à pied. Le chemin est bien large et entièrement pavé. On voit bien notre objectif et le chemin qui y mène semble assez raide.
Nous rejoignons d’abord la ligne de crête puis marchons jusqu’à un grand col où plusieurs bâtiments ont été construits. L’endroit s’appelle Dom Śląski et se trouve au pied du sommet. Il y a beaucoup de monde car l’arrivée du télésiège n’est pas loin et l’endroit offre un magnifique panorama sur les deux pays. La grande terrasse du restaurant est pleine.
La frontière entre la Pologne et la République Tchèque suit la ligne de crête et à intervalles réguliers, des panneaux portant les armoiries du pays voisin sont plantés.
Il y a deux moyens d’atteindre le sommet, la route pavée qui monte régulièrement en faisant le tour du mouvement de terrain et un sentier lui aussi pavé qui monte presque tout droit sur une épaule. C’est ce dernier que nous choisissons.
Au sommet, on trouve l’observatoire météorologique tout rond, une chapelle assez massive et la gare d’arrivée d'un téléphérique du coté tchèque.
Le panorama tant vers la Pologne au nord que vers la République Tchèque au sud est immense. Il y a beaucoup de monde et des milliers de photos sont prises.
Nous redescendons par la route, moins pénible pour nos genoux un peu usés.
Pour revenir à Karpacz, j’ai choisi de suivre l’un des itinéraires de randonnée balisé en rouge qui suit la crête jusqu’à un point baptisé Słonecznik sur la carte puis d’emprunter l’itinéraire vert qui descend directement à la station.
De là-haut, on bénéficie d’une vue splendide sur le lac Maly Staw au fond d’une sorte de cirque glaciaire. Une grande ferme auberge a été construite et attire beaucoup de monde.
C’est au-dessus de ce joli lac que nous faisons la pause repas face à cet extraordinaire paysage. Le soleil chauffe mais un désagréable vent froid prend le dessus quand le soleil est caché par les nuages.
Nous pouvons remplir nos gourdes à une source qui jaillit au bord du chemin.
Plus loin, apparait le deuxième lac, Wielki Staw, bien plus grand et complètement isolé.
Tout au bout de la crête, nous arrivons à Słonecznik. C’est un énorme bloc de rocher, rongé par l’érosion qui se dresse tel une tour en ruine au-dessus des pins rabougris. Pas mal de gens ont choisi cet endroit pour faire la pause car le site est pittoresque.
Il y a des panneaux explicatifs mais uniquement en polonais donc totalement hermétiques pour nous.
De là, nous entamons la descente plutôt raide par un sentier pavé qui s’insinue entre les pins.
Un peu plus bas, on passe près de plusieurs autres rochers de granit se dressant au-dessus des sapins. Ceux-ci sont baptisés Pielgrzymy et sont tout aussi spectaculaires que celui d’en haut.
Le chemin traverse la grande prairie de Polana par une passerelle en planches au-dessus du terrain marécageux. Des orchidées y poussent en nombre, des ophrys pyramidalis bien caractéristiques et une autre espèce que je ne connais pas.
De l’autre côté de la prairie, on retrouve l’itinéraire vert qui, par une interminable descente, nous ramène à Karpacz.
Comme il n’est pas encore 17 h, nous décidons de retourner voir l’église de Wang pour la voir éclairée par le soleil et surtout pour la visiter.
Après un moment d’incertitude, j’ai pu entrer dans l’église et même, chose rare, bénéficier d’explications en français.
Tout est en bois à l’intérieur où règne une agréable odeur de bois et de résine. Les portails d’entrée et les chapiteaux des colonnes intérieures sont sculptés.
Tout autour une galerie fermée et éclairée par des fenêtres constituées de hublots ronds protégeait les fidèles des intempéries et devait isoler l’église du froid.
Même le baptistère est en bois remarquablement sculpté.
Une très belle journée un peu fatigante mais qui nous a permis d’admirer de magnifiques paysages. Ces chemins de randonnée sont excellents, très bien signalés et pavés en plus.
J 5 - Lundi 24 juin - KARPACZ - KUDOWA ZDÖJ 206 km
Nous quittons Willa Luma après avoir embrassé Margarita qui a été une hôte très aimable et serviable.
Avant de rejoindre l’hébergement suivant dans les Montagnes Tabulaires, nous passons par Jawor et Świdnica voir les fameuses églises de la paix.
Le traité de Westphalie qui mit fin à la guerre de Trente Ans en 1648 accordait la liberté de croyance aux protestants dans cette région éminemment catholique. Mais dans les faits, ce n’était pas une liberté totale. Pour mettre quelque embarras à la pratique religieuse, des restrictions avaient été imposées aux temples : construction en bois, paille et terre, pas de clocher ni de signe montrant la fonction religieuse de l’édifice qui devait, de surcroit, être construit à "une portée de canon du centre-ville".
Les protestants ne se découragèrent pas et construisirent les plus grands bâtiments religieux à charpente en bois d’Europe. Leur austérité extérieure ne faisait qu’amplifier le faste et l’exubérance de leurs intérieurs baroques. Sur les trois "églises de la paix" construites, deux ont subsisté jusqu’à aujourd’hui.
L’église de Jawor se dresse dans un parc qui était autrefois un cimetière, planté de magnifiques tilleuls gigantesques.
Elle fut donc construite en 1654 et 1655 en bois et en torchis, ce qui lui donne cet aspect inhabituel.
L’intérieur n’en est que plus surprenant. L’église, consacrée au Saint-Esprit, pouvait accueillir 6000 fidèles dans sa nef rectangulaire ceinturée de quatre galeries. Tout est en bois et tout est peint. Les balcons sont décorés de scènes de l’Ancien et du Nouveau Testament et ornés des armoiries des riches donateurs qui ont financé sa construction tandis que le plafond bleu et blanc est couvert de motifs végétaux.
Une vingtaine de kilomètres plus loin, nous nous arrêtons dans la petite ville de Świdnica qui s’enorgueillit elle aussi d’une église de la paix construite en 1656 et entourée d'un grand parc. C'était un cimetière dans un lointain passé et les tombes sont toujours là, sous les grands arbres.
Une maquette de l’ensemble du site permet de se faire une idée de la disposition des lieux.
Elle fut elle aussi construite en bois et en torchis selon un plan cruciforme augmenté de porches et d’absides.
L’intérieur est encore plus époustouflant que celui de l’église de Jawor. Elle pouvait accueillir 7500 personnes dont 3000 pouvaient prendre place dans les deux étages de galeries aux balustrades décorées d’épitaphes.
Consacrée à la Sainte Trinité, elle est décorée d’un magnifique autel et d’une chaire baroque de toute beauté.
Les balustrades et autres colonnes semblant être en marbre sont en fait en bois peint.
Sur le côté, la loge des Hochbergs richement ornée construite en 1698 pour remercier la famille du comte Johann Heinrich von Hochberg qui fournit le bois nécessaire à la construction de l’église, soit environ 3 000 chênes. On peut y voir les blasons de la famille et une plaque commémorative en l’honneur du comte.
Conformément à la règle imposée, le clocher est à part et n’est pas plus haut que l’église.
Sur l’avenue voisine où nous avons garé notre voiture, nous remarquons une pancarte signalant l’entrée du lycée local qui porte le nom de Marii Skłodowskiej Curie, la célèbre physicienne et chimiste d’origine polonaise qui obtint le prix Nobel en 1903 pour ses recherches sur la radioactivité puis en 1911 pour ses travaux sur le polonium et le radium.
Il est plus de 14 h quand nous quittons les lieux. Il est temps de s’arrêter pour déjeuner. La halte pique-nique se fait dans la campagne sur la route de Belawa.
La grand route mène en République Tchèque et est encombrée de nombreux camions qui ralentissent notre avance, ce qui ne nous empêche pas d'arriver sans encombre à Kudowa Zdrój, une ville thermale située à quelques kilomètres à peine de la frontière et qui bénéficie de huit sources riches en minéraux.
Notre hébergement est une auberge magnifique, un vrai palais. Chambre confortable, décoration digne d’un château, salle à manger somptueuse.
Il est encore tôt et nous décidons d’aller voir la ville. Il y a de beaux immeubles et un grand parc à l’anglaise où se mêlent pelouses, grands arbres, parterres de fleurs et un grand étang enjolivé d’un jet d’eau.
On y trouve une source où jaillit une eau glacée. La composition de l’eau est même affichée sur un panneau.
Plus loin, c’est une jolie statue en bronze d’un jardinier assis sur un banc, son arrosoir à la main, qui attire notre regard, ainsi que les drapeaux du pays, de l’UE, de la province et de la ville.
Nous profitons de l’occasion pour dîner dans le restaurant qui s’enorgueillit d’avoir reçu les présidents polonais et tchèque lors d’une rencontre quelque temps auparavant, avant de rentrer dans notre palais.
J 6 - Mardi 25 juin - KUDOWA ZDÖJ - WROCŁAW 136 km
Nous quittons la ville sous un beau soleil. Première destination, le village voisin de Czermna où nous voulons voir la fameuse chapelle des crânes, Kaplica Czaszek.
Elle se situe dans un ensemble qui comprend une église, un cimetière et un clocher. Le cimetière est très aéré et agréable. Une longue allée le traverse menant à l’église, ornée des stations d’un chemin de croix original.
L’église est très sobre. Nous admirons son toit aux courbes parfaites.
L’intérieur très clair est tout aussi dépouillé que l’extérieur où trône une statue de Jean-Paul II. Nous en avions vu beaucoup lors de notre précédent voyage dans ce pays. Jean-Paul II est une véritable idole en Pologne.
Nous entrons finalement dans la chapelle en même temps qu’une dizaine d’autres visiteurs et d’un guide. Les photos étant interdites, j’ai dû ruser pour en prendre quelques-unes subrepticement. Sans viser, le cadrage s’en ressent.
La chapelle est entièrement tapissée de crânes et de fémur, environ 3000 parait-il, qui proviennent des victimes tuées lors des guerres qui ont endeuillé la Silésie au 17° siècle et des épidémies de peste et de choléra qui frappèrent la région lors de la deuxième moitié du 18° siècle. C'est le curé du lieu qui réalisa cette œuvre macabre entre 1776 et 1804, récupérant les ossements dans différentes fosses communes.
Les explications du guide étaient écoutées religieusement par l’assemblée mais elles étaient malheureusement en polonais. À la fin de son discours, le guide souleva une trappe dans le plancher nous permettant de voir d’autres crânes et ossements entreposés la dessous.
Puis, les visiteurs récitèrent une prière et se recueillirent avant de sortir.
Nous partons ensuite en direction de Radków pour aller marcher dans le parc national des Monts Tabulaires. Ce sont des montagnes de grès dont les sommets sont en forme de table que l’érosion a transformé en créant des formes étranges. La montagne est couverte d’une forêt de pins et de sapins qui se mélange à l’amas de rochers.
La voiture garée sur un parking bien évidemment payant, nous suivons le flot des visiteurs vers l’entrée du site.
Puis, il faut grimper jusqu’au sommet du mouvement de terrain par un long escalier de 665 marches irrégulières taillées dans le rocher.
Du sommet, on bénéficie d’un superbe panorama sur toute la région.
À partir de là, on suit un parcours aménagé au milieu des blocs de rochers aux formes fantastiques.
On grimpe sur l’un des blocs qui est en fait le point culminant à 919 m d’altitude. Encore un beau panorama.
Puis le parcours s’enfonce dans un labyrinthe étonnant par des passages qui, parfois, ne dépassent pas 20 à 30 cm de largeur et où il faut par endroit se glisser à quatre pattes sous les blocs de rocher. Un magnifique parcours assez sportif.
L’une des dernières figures est représentée par ces deux rochers face à face ressemblant à deux hommes en train de discuter.
La descente se fait par une autre longue série d’escaliers et aboutit près de l’entrée.
Il ne reste qu’à traverser le long alignement de boutiques de souvenirs, de boissons et de nourriture en essayant de ne pas trop céder aux multiples tentations.
Nous retrouvons la grande route et rejoignons la ville de Wrocław à quelques 140 kilomètres de là.
L’hébergement se trouve en pleine ville dans une rue sans circulation. Nous y disposons d'une grande chambre avec balcon, d'une salle de bains privée et nous pouvons utiliser la vaste cuisine commune bien équipée.
Nous terminons la journée par une promenade au centre-ville pour se faire une petite idée des lieux.
J 7 - Mercredi 26 juin - WROCŁAW
La journée est consacrée à la visite de cette ville. Il fait grand beau et la température atteint et sans doute dépasse les 30°.Capitale de la Silésie, la plus grande ville du sud-ouest de la Pologne est construite sur le fleuve Oder franchi par pas moins de 110 ponts. Comme toujours, c’est le centre-ville, cœur de l’ancienne cité médiévale qui concentre tous les sites à voir.
Nous descendons l’avenue Hugona Kołłątaja, traversons le pont Skargi qui franchit un bras mort de l’Oder puis l’avenue du même nom et nous arrivons sur la grande place Dominikański entourée de grands centres commerciaux et où plusieurs lignes de tramways se croisent.
Nous y rencontrons le premier gnome, statue en bronze d’un lutin. Une quinzaine sont dispersés dans la ville, prenant des poses adaptées au lieu où ils se trouvent.
La grande place centrale, le Rynek, est près de là au bout d’une belle rue piétonne.
Ce vaste rectangle est bordé de maisons aux façades baroques ou classiques qui, pour la plupart, furent restaurées après les destructions de la guerre. Diverses maisons se font remarquer par leurs décorations spécifiques.
La place est agrémentée de quelques monuments, telles la fontaine de verre ou la statue de l’écrivain Aleksander Fredro qui se trouvait autrefois à Lviv en Ukraine.
Au centre de la place, s’élève la silhouette massive de l’hôtel de ville décorée de tourelles d’angle, de toits coniques, et parée d’une flamboyante façade ornée d’une horloge astronomique datant de 1580.
La façade sud est décorée de nombreuses sculptures figurant des personnages de l’époque médiévale.
Près du Rynek, la place au sel plus petite se fait remarquer par sa maison à l’enseigne du nègre.
Nous allons ensuite jusqu’à l’église Sainte Élisabeth dont le clocher domine la ville. Pour y arriver, il faut franchir le porche qui relie les maisons Jeannot et Margot, entrée symbolique sur le parvis de la cathédrale.
Je me décide à grimper les 365 marches qui permettent d’accéder au balcon agréablement venté. La vue sur la ville et les environs est splendide. Juste en dessous, on peut admirer le très beau toit de la cathédrale à damiers rouges et verts.
En redescendant, je remarque un autre gnome posté près de la cathédrale. C’est un gnome soldat qui monte la garde.
L’intérieur de l’église est magnifique. Cette église qui date des 14° et 15° siècles, fut protestante jusqu’à la fin de la 2° guerre mondiale. Elle est construite toute en briques et l’absence de décoration sur ses murs fait paraitre la nef vertigineusement haute.
Elle dispose d’un magnifique orgue monumental enchâssé à mi-hauteur de la nef.
On trouve aussi en bonne place une statue de Jean-Paul II, particulièrement honoré dans toute la Pologne.
En faisant le tour de la nef, nous découvrons l’une après l’autre, les différentes chapelles.
Il y a la chapelle du Saint Sacrement et ses magnifiques vitraux.
On y trouve aussi des chapelles qui sont des commémorations d’évènements qui ont marqué l’histoire de la Pologne.
La chapelle de Katyń en est une. Au printemps 1940, à Katyń en Union Soviétique, la police politique de l’URSS (NKVD), sur ordre de Staline, organisa le massacre de plusieurs milliers de Polonais, officiers de l’armée mais aussi étudiants, médecins, ingénieurs, enseignants et autres membres de l’élite du pays considérés comme hostile à l’idéologie communiste.
Ce massacre fut révélé par l’armée allemande en 1943 qui l’exploita au profit de sa propagande anti bolchevique. Il fallut attendre 1992 pour que Boris Eltsine reconnaisse les faits devant Lech Walęsa. Environ 22 000 personnes furent exécutées et plus de 60 000 furent déportées en Sibérie.
C’est donc un évènement qui a profondément marqué le pays et dont on trouve des monuments commémoratifs un peu partout.
Il y a aussi une chapelle à la mémoire des nombreux déportés en Sibérie.
La rue des anciens bouchers est devenue une ruelle où s’alignent les boutiques d’artistes. Pas très intéressante à mon goût à part les statues d’animaux à l’entrée.
Nous passons devant l’université, grand ensemble baroque fondé par les Jésuites en 1670 à l’emplacement d’un château. La tour carrée qui domine la façade est ornée de statues allégoriques. Le bâtiment est fermé le mercredi ce qui ne nous dérange pas car nous n’avions pas l’intention de le visiter. Sur la petite place voisine, la statue d’un escrimeur nu a, bien évidemment, toujours été la cible des facéties des étudiants.
Dans la rue, de jolies filles prennent la pose et se prennent en photo. Je demande la permission et fais de même.
L’Ossolineum est une fondation œuvrant pour la science et la culture polonaise installée dans un magnifique hôtel particulier entourant une très jolie cour. De son vrai nom Institut national Ossliński, du nom de son fondateur, elle naquit en 1817 et comprend une bibliothèque, une maison d’édition et un musée.
Nous continuons notre promenade à travers la ville. Deux jolies blondes à la magnifique chevelure marchent sur le trottoir devant nous. Comme au Danemark deux ans auparavant, ici les blondes sont majoritaires.
Quant aux tramways, ils ont l’air un peu vieillots mais sont efficaces.
Nous passons devant la Hala Targowa, le marché de la ville bien agréable. Les stands de fruits où s’entassent cerises, framboises, myrtilles et champignons sont très tentants et nous achetons de quoi nous rafraichir.
Nous traversons l’Oder pour aller sur l’île de Sable puis, par le pont Tumski, dans le quartier Ostrów Tumski, le plus ancien de la ville. Pour Wroclaw, tout a démarré là sur une île qui cessa de l’être avec le comblement en 1810 du bras de l’Oder qui l’isolait de la rive. Là s’élèvent l’église Ste Croix et St Barthélémy et la cathédrale St Jean-Baptiste.
Encore des gnomes, dont un plié sous le poids des cadenas qui, comme chez nous, sont accrochés par milliers aux balustrades des ponts.
Sur les conseils d’un "colocataire", nous allons faire un tour en bateau sur l’Oder. Cela nous permet d’être assis à l’ombre et d’admirer la ville sous un angle inhabituel.
Après nous être renseignés sur le réseau de tramway, nous prenons le numéro 10 pour aller voir le zoo.
Il est assez décevant car pas très bien entretenu et, avec la chaleur, les animaux se cachent pour rester à l’ombre et au frais. De toute façon, ce n’est pas un spectacle bien satisfaisant de voir ces pauvres animaux enfermés.
Juste en face, s’élève un horrible bâtiment circulaire en verre et béton entouré d’absides et surmonté d’un dôme qui fut construit en 1912 et 1913 pour commémorer le centenaire de la défaite de Napoléon à Leipzig. L’endroit accueille des expositions, des concerts et des manifestations sportives. Nous ne nous en approchons même pas.
Retour en ville par le même tramway. Sur le bastion Sakwowy que nous traversons pour rentrer chez nous, de très jolies jeunes femmes posent à tour de rôle pour une séance photo. Shooting de mode ou pré-qualification d’un quelconque concours de Miss ?
Nous voilà revenus "chez nous" après une longue journée chaude et fatigante.
J 8 - Jeudi 27 juin - WROCŁAW - OJCÓW 316 km
Nous quittons Wrocław et roulons vers l’est.Premier arrêt à Częstochowa surnommée le Lourdes polonais. En effet, sur une colline dominant la ville a été construit le monastère Jasna Góra (ce qui signifie la colline lumineuse) fondé en 1382 par Ladislas II, duc d’Opole, pour recevoir les disciples de l’apôtre Paul. Puis il fit venir une icône de la Vierge noire à qui on attribuait des miracles légendaires et elle devint un objet de vénération.
Devenu source de convoitise, le monastère fut fortifié au début du 17° siècle et il soutint victorieusement de nombreux sièges, dont celui de 1655 où les 160 soldats et 70 religieux repoussèrent les 4 000 soldats suédois. Ce "miracle" fut attribué à la Vierge et contribua à mobiliser la nation polonaise. L’église est toujours restée l’ultime patrie, surtout en période d’occupation, mais la ferveur religieuse attachée à la ville ne plaisait pas du tout aux communistes qui tentèrent de l’affaiblir en y créant un puissant centre industriel. Sans succès.
Depuis l’immense parking, on accède au centre monastique via une longue avenue ornée des drapeaux de tous les pays.
La basilique de la Sainte Croix est une église gothique devenue baroque. L’extérieur est assez sobre, le bâtiment tout blanc surmonté d’un haut clocher ne comprenant que quelques décorations près de l’entrée, un double cadran solaire et une fresque multicolore représentant la fameuse Vierge noire entourée d’anges et de personnages.
Par contre, l’intérieur est très chargé de dorures, statues et autres décorations. La foule s’y presse, recueillie, mystique même.
Les gens font la queue pour approcher la chapelle Notre-Dame où est installé le célèbre tableau de la Vierge Noire en grande partie cachée par des ornementations en or et pierres précieuses. Seuls les visages de la Vierge et de l’enfant ainsi qu’une main sont visibles.
En 1430, l’icône fut profanée par une bande de pillards. Seule trace à peine visible aujourd’hui, deux cicatrices sur la joue de la Vierge. Nous faisons nous aussi la queue pour approcher l’icône miraculeuse.
Nous passons dans les autres salles du monastère dont la grande salle des chevaliers garnie de bannières et où sont présentés des objets ayant appartenu au pape Jean-Paul II qui vint ici célébrer une grande messe et prononcer un discours le 17 juin 1999. Une grande statue du Saint-Père a été érigée en souvenir de cet évènement.
Nous reprenons la route et faisons un arrêt pique-nique au bord de la route dans la forêt. Un gros orage avec de la grêle nous tombe dessus mais ne dure pas. Étonnamment, nous avions été prévenus par un sms sur nos téléphones portables.
Nous empruntons un itinéraire appelé la route des nids d’aigle le long de laquelle se dressent plusieurs châteaux en ruine qui montrent bien l’importance stratégique de cette région au Moyen Âge.
Nous ne nous arrêtons pas au premier, le château d’Olsztyn car il s’est mis à pleuvoir. Le suivant est le château d’Ogrodzieniec qui se dresse au sommet d’un piton rocheux dont les parois ont été utilisées pour les fortifications. Le soleil est revenu et nous pouvons le visiter tranquillement.
Il débuta sa carrière au 12° siècle comme simple village entouré d’une palissade de bois s’appuyant aux rochers de la colline, fut détruit et brulé en 1241 lors de l’invasion des Tatars et reconstruit en pierres. Il fut agrandi et amélioré au cours des siècles jusqu’à l’invasion suédoise de 1655 au cours de laquelle une partie des remparts fut détruite. L’invasion suédoise suivante en 1702 lui fut fatale et il fut définitivement abandonné en 1810. Ce qu’il en reste est malgré tout assez impressionnant avec les murailles s’élançant au sommet d’un piton rocheux aux pentes herbeuses, la porte avec pont-levis et herse, la cour centrale, les caves obscures, les bastions crénelés et la haute tour dominant la campagne environnante.
Quand nous repartons, nous regardons les orages passer dans le lointain. Vont-ils venir vers nous ?
Nous roulons sur d’agréables petites routes dans la campagne polonaise où les immenses champs de céréales alternent avec de grands bois de pins et de feuillus.
Nous arrivons au château Pieskowa Skała. Lui aussi est perché sur un piton rocheux qui domine la vallée dans laquelle coule la Prądnic et se faufile la route. Malheureusement, il est fermé et nous nous contentons de le regarder de l’extérieur. Tout à côté, une concrétion rocheuse étonnante jaillit des bois. C’est la massue d’Hercule.
Nous nous arrêtons pour la nuit au petit camping installé près du château en lisière de forêt sur le plateau.
Une belle journée où il a encore fait chaud.
J 9 - Vendredi 28 juin - OJCÓW - SANDOMIERZ 316 km
Et une bonne nuit malgré des voisins un peu bruyants.Nous redescendons visiter le château Pieskowa Skała magnifique sous le soleil. Au bord de la route, au départ du sentier qui mène au château, une coquille Saint-Jacques annonce un chemin vers Compostelle. C’est la voie Regia. Internet m’apprend que cette voie démarre de Moscou, passe par Smolensk, Brest-Likov en Biélorussie, Vilnius, Lublin et Wroclaw en Pologne, Leipzig et Frankfurt en Allemagne puis Reims, Paris, Tours, Bordeaux avant d’arriver à la frontière espagnole et de se raccorder au Camino Frances.
Construit au 14° siècle pour faire partie de la ligne de défense de la frontière silésienne, le château de Pieskowa Skała fut transformé plus tard en une belle résidence rénovée en 2016 et qui offre aujourd’hui le spectacle de ses murs blancs, de ses échauguettes et de ses parterres de fleurs, de sa belle cour intérieure aux galeries à arcades ornées de bas-reliefs. Le puit et le mécanisme permettant de remonter l’eau ont aussi été restaurés.
Nous repartons vers le prochain centre d’intérêt, la petite ville de Jędrzejów où se trouve un musée particulièrement original et très intéressant, un musée des cadrans solaires. Pour celles et ceux qui ont lu mes précédents récits, vous connaissez mon intérêt pour les cadrans solaires et je ne pouvais décemment pas rater ce lieu.
C’est un musée dû à la passion du Docteur Przypkowski pour la science gnomonique, qui a amassé ici une quantité incroyable de cadrans solaires.
Dès l’entrée, une devise en latin "Cursus temporis est mors temporis ergo mors temporis est tempus" (le cours du temps est la mort du temps, donc la mort du temps est le temps) donne le ton.
On parcourt d’abord les pièces de la maison familiale reconstituée en l’état avant d’arriver à la grande salle où sont exposés dans des vitrines des cadrans solaires miniatures provenant de nombreux pays. Même si l’on n’est pas passionné de cette façon de mesurer le temps, on ne peut qu’être captivé par cette incroyable collection, la troisième plus grande collection au monde.
La collection se poursuit dans le jardin où une vingtaine de cadrans solaires sont présentés.
C’est pendant que nous faisons nos courses dans les magasins de la petite ville qu’il commence à pleuvoir. Encore des orages. On voit les cumulus monter dans le ciel. Nous avons le temps de revenir à la voiture avant que la pluie ne s’intensifie.
On roule sous des trombes d’eau puis, tout doucement, ça se calme et au bout de quelques kilomètres, nous retrouvons le soleil. Il est temps de faire la pause déjeuner, ce que nous faisons dans une agréable forêt de pins.
L’étape suivante, le château de Baranow Sandomienski encensé par le guide Vert, est inaccessible car devenu un hôtel de luxe. Nous finissons d’arriver à Sandomierz, une petite ville construite sur une colline dominant la Vistule. Nous allons directement au camping où nous nous installons sous de grands chênes.
Puis nous montons voir la vieille ville au-dessus du camping.
C’est une petite ville de province très tranquille.
Le Rynek tout en pente est entouré de maisons aux jolies façades.
Au milieu se dresse un imposant hôtel de ville avec sa tour clocher qui ressemble un peu à un phare et arbore un cadran solaire assez simple.
Nous remontons la rue Opatów jusqu’à la porte du même nom.
Du sommet, la vue sur la ville n’est pas extraordinaire mais on peut admirer un magnifique orage en train de se former.
Après avoir bu un verre à une terrasse, nous redescendons au camping préparer notre repas et installer un abri au cas où l’orage éclate car le ciel est vraiment menaçant.
J 10 - Samedi 29 juin - SANDOMIERZ - WARSZAWA 290 km
L’orage est allé ailleurs et la nuit a été tranquille. Nous quittons Sandomierz pour rejoindre la ville de Lublin à quelques 150 kilomètres de là. On roule dans une campagne très cultivée. Les champs de blé, de seigle ou d’avoine, les vergers de cerisiers ou de framboisiers, les cultures maraichères se succèdent, à peine interrompues par quelques bois de pins ou de chênes.Lublin est une ville de 350 000 habitants qui a joué un assez grand rôle dans l’histoire de la Pologne, depuis la signature de l’union avec la Lituanie en 1569 jusqu’à la création du premier gouvernement indépendant en 1918. Les juifs y étaient nombreux et vivaient en harmonie avec les catholiques. Jusqu’à l’arrivée des envahisseurs nazis qui les exterminèrent.
La vieille ville est assez petite et n’a subi que peu de destructions pendant la guerre. Elle se serre sur une colline qui domine la plaine et les quartiers modernes.
Nous nous garons sur le grand parking au bord de l’axe nord-sud qui traverse la ville. Un grand marché en occupe une bonne partie et nous y achetons une livre de délicieuses cerises provenant de l’un des vergers que nous avons vu le long de la route.
Le parking est bordé d’un grand parc planté d'arbres magnifiques qui s’étale au pied de la ville.
Un peu à l’écart, le château royal occupe une autre éminence sur laquelle il étale ses remparts blancs et ses tours. Il date du 14° siècle mais fut reconstruit au début du 19° dans le style en vogue à cette époque.
Nous grimpons au sommet du donjon en brique qui fait partie de la construction originelle. De la terrasse, la vue s’étend sur la vieille ville et sur les quartiers modernes qui l’entourent.
Nous entrons ensuite voir la magnifique chapelle de la Sainte Trinité réalisée sur l’ordre du roi Ladislav Jagellon vers 1418. Les murs de cette chapelle gothique ont été recouverts de fresques russo-byzantines, un cas unique dans l’art médiéval occidental. Des voûtes en palmier reposent sur un pilier central octogonal.
Les peintures de la voûte contiennent des représentations d’anges et de la Sainte Trinité ainsi qu’un Christ en majesté. Sur la partie haute des murs, ce sont des évènements liés à la vie du Christ et de Marie tandis que des peintures représentant le fondateur en prière abondent un peu partout.
Une sorte de chaussée surélevée relie l’entrée du château à la porte Grodska longeant la place du château bordée de belles maisons aux toits rouge vif.
Nous franchissons la porte et remontons la rue Grodska.
Elle mène directement au Rynek bordé de maisons aux façades bien restaurées, certaines arborant fresques murales, fenêtres ouvragées et autres décorations.
Au centre de la place, s’élève l’hôtel de ville de style néoclassique. Un mariage est en train de sortir du bâtiment. Une jolie mariée (mais ne le sont-elles pas toutes ?), un marié en tenue d’officier et une haie d’honneur de ses compagnons d'arme faisant une voute avec leurs épées.
De l’autre côté du Rynek, la rue Bramowa mène à la Brama Krakowska, la porte de Cracovie, seul vestige des remparts de jadis, qui ne fait pas ses 700 ans.
Pause repas à la terrasse ombragée et ventée d’un agréable restaurant pour se reposer de la grosse chaleur fatigante, il fait 32 ou 33°, avant de revenir dans la vieille ville.
Nous passons voir la cathédrale et sa blanche façade.
En revanche, l’intérieur est trop kitsch à mon goût.
Plus loin, se dresse l’église dominicaine fondée en 1342 par le roi Casimir le Grand mais il fallut la reconstruire après un incendie. C’est là que fut signé le fameux traité de Lublin en 1569 qui réunit les royaumes de Pologne et de Lituanie.
Là aussi, le style est bien chargé.
En revenant vers le Rynek et la porte Grodska, nous remarquons cet équilibriste et aussi un balisage d’un chemin de Compostelle. Toujours la voie Regia.
Nous récupérons notre voiture et rejoignons la capitale Varsovie par une belle autoroute toute neuve sur laquelle nous doublons des dizaines de semi-remorques immatriculés en Ukraine.
L’hostel où nous logeons se trouve dans la banlieue nord de la ville dans un quartier de maisons pavillonnaires bien tranquille à environ 4 ou 5 kilomètres du centre.
La jeune femme qui nous accueille est aussi ukrainienne.
Nous allons dîner dans un petit restaurant italien du quartier.
J 11 - Dimanche 30 juin - WARSZAWA
La journée est consacrée à la visite de Varsovie.Avec plus de 3 millions d’habitants, Varsovie est aujourd’hui le plus grand centre économique d’Europe centrale. Mais il n’en a pas toujours été ainsi, la ville ayant longtemps vécu sous la domination de puissances étrangères. La Pologne ne retrouva son indépendance qu’en 1918 et travailla à reconstituer un pays libre, mais tous ses efforts furent anéantis par les bouleversements de la seconde guerre mondiale.
En septembre 1939, Hitler envahit la Pologne et ce fut le début des années les plus noires de l’histoire de la ville et du pays : les dirigeants furent déportés ou emprisonnés et, à partir de 1940, toute l’importante population juive fut enfermée dans le ghetto et soumise à un régime de répression et de famine avant d’être envoyée dans les camps de concentration.
Au début de l’été 1944, quand les troupes allemandes commencèrent à reculer devant l’avance des Russes, la résistance polonaise déclencha une insurrection pour accélérer la libération de Varsovie, comptant sur l’aide des alliés russes. Mais les troupes russes stationnées de l’autre côté de la Vistule ne bougèrent pas, laissant les Allemands procéder sur ordre exprès d’Hitler au massacre de la population et à la destruction systématique de la ville.
Quand les troupes russes entrèrent finalement dans la ville, elle était réduite en cendres et 800 000 habitants avaient trouvé la mort. Sans pitié, les survivants furent envoyés dans des camps de travail en Sibérie.
Après la guerre, les habitants commencèrent à revenir et à rebâtir la ville, pierre par pierre et brique après brique.
Depuis, après 123 ans de partage entre les empires prussien, russe et austro-hongrois, 6 ans d’occupation nazie et 45 ans de dictature communiste, la Pologne a enfin retrouvé une vraie indépendance et Varsovie son statut de capitale et a entrepris un développement qui la met au niveau des autres capitales européennes.
Nous partons à pied jusqu’à la station de métro qui se trouve à 400 ou 500 mètres et embarquons dans une rame moderne et climatisée qui nous emmène en moins d’une demi-heure au centre-ville.
En débouchant à la surface, nous découvrons que nous sommes à l’angle du grand parc qui entoure le palais de la culture et des sciences, cet énorme édifice, cadeau empoisonné de la nation soviétique à la nation polonaise.
Du haut de ses 237 m, il domine toute la ville et est le bâtiment le plus élevé du pays. Il fut construit en 3 ans par les brigades socialistes internationales pour concurrencer les gratte-ciels américains. Malheureusement pour lui, il reste associé à la présence soviétique en Pologne et n’est pas très apprécié des habitants. Il s’appelait à l’origine Joseph Staline, faillit être démoli et sauva sa peau en devenant le siège de sociétés occidentales.
Nous en faisons le tour en restant le plus possible à l’ombre, cherchant l’office du tourisme qui est censé s’y trouver. Une préposée parlant français, chose rare, nous renseigne aimablement et avec efficacité. Elle nous apprend que les plus de 70 ans ne payent pas les transports en commun en Pologne et nous donne un ticket nous permettant de passer les contrôles d’accès sans problème.
Nous profitons d’être sur place pour grimper au 30° étage de l’impressionnant immeuble et profiter de la vue et du vent bien rafraichissant, ce qui est d’ailleurs, le seul intérêt de ce bâtiment.
Nous prenons ensuite un bus pour nous rapprocher de Stare Miasto, la vieille ville. Ce qui est un paradoxe, car ayant été entièrement rasée, elle est toute neuve ayant été reconstruite après la guerre. Mais ce fut fait méticuleusement, en s’inspirant de gravures du 18° siècle, pour reproduire à l’identique les édifices et monuments dont certains dataient du Moyen-âge.
Nous débouchons sur la place Zamkowy, bordée par le magnifique palais royal et des maisons aux belles façades peintes et au milieu de laquelle se dresse une colonne de 22 m de haut portant une statue de bronze du roi Sigismond III.
C’est un endroit très animé. Beaucoup de touristes la parcourent dans tous les sens et on ne peut pas rater quatre filles habillées de manière assez voyante qui semblent préparer un clip à poster sur Instagram ou Tiktok.
Au pied de la colonne, une petite chorale aux tenues bien plus discrètes s’est installée et chante des chansons traditionnelles polonaises accompagnée par une paire d’accordéonistes.
Nous parcourons les rues de la vieille ville. La rue Piwa et ses magasins d’ambre, puis la rue Swiętojariska où se trouvent deux églises côte à côte, l’église Notre-Dame des Grâces et la cathédrale Saint-Jean à l’étonnante façade moderne.
Un bel intérieur enjolivé par une multitude de drapeaux et éclairé par de magnifiques vitraux multicolores.
Nous débouchons sur la place du marché, le Rynek, aux jolies façades colorées. Pratiquement toute la place est prise par les terrasses des restaurants et bars et par les étals des marchands de fleurs.
Sur l’une des maisons, une belle frise présente une série d’angelots.
Nous poursuivons jusqu’à la barbacane, ancienne porte de la ville aux magnifiques fortifications en briques rouges.
Puis nous empruntons la rue Freta et avançons jusqu’au numéro 16 où se trouve la maison natale de Marie Skodowska-Curie transformée en un intéressant musée où sont exposés photographies, courrier et effets personnels.
Nous revenons vers la barbacane et, au lieu de rentrer dans la vieille ville, suivons la promenade le long des remparts.
On y trouve plusieurs monuments dont le plus intéressant est celui du Petit Insurgé, certainement le plus émouvant de ceux ayant trait à cette époque. Avec son casque et ses bottes bien trop grands pour lui, l’arme qu’il porte comme un vrai soldat, il rend hommage aux enfants morts lors de l’insurrection de Varsovie en 1944.
Ce parcours nous ramène à la place Zamkowy. Nous empruntons alors le début de la Voie Royale qui reliait les diverses résidences des rois polonais. Elle commence au château de la vieille ville, emprunte la rue Krakowskie Przedmieście et s’étire jusqu’à la résidence d’été du palais de Wilanów en passant par le palais de chasse d’Ujazdów et le parc de Łazienki, sur une quinzaine de kilomètres.
Notre intention est d’aller jusqu’au musée Chopin installé dans le palais Ostrogski. Mais en arrivant sur place, nous sommes déçus car il va fermer. Nous sommes arrivés trop tard.
A la place, nous nous contentons de la statue de Copernic au bord de la large avenue. Tout autour, le pavage dessine notre système solaire avec les orbites des différentes planètes représentées par des disques de cuivre.
La journée finie, nous redescendons dans le métro pour rentrer chez nous. À la sortie du métro, nous faisons nos courses dans ce supermarché, ouvert 7 jours sur 7 de 6 heures à 23 heures.
J 12 - Lundi 1 juillet - WARSZAWA
Deuxième journée à Varsovie.Le temps est bien meilleur. Les orages annoncés ne sont pas arrivés jusqu’ici mais le ciel est couvert et la température très agréable. Nous faisons connaissance avec Carolina, notre voisine de chambre, polonaise mais vivant aux USA, venue voir sa grand-mère qui vient de fêter son centième anniversaire. Nous allons ensemble jusqu’à la station de métro et embarquons à nouveau dans une belle rame pour rallier le centre-ville.
Cette fois-ci, nous descendons plus tôt, à la station Centrum Nauki Kopernik, au bord de la Vistule car nous tenions à voir le fleuve.
Tout à côté, a été érigée une statue de la sirène, protectrice de la ville.
Encore une légende. Deux sœurs sirènes qui vivaient sur les bords de la Baltique se perdirent. La première alla s’échouer dans les détroits danois et trône aujourd’hui à l’entrée du port de Copenhague. La deuxième remonta la Vistule et rencontra deux amants, Wars et Sawa, à qui elle demanda de fonder une ville et de lui donner leurs deux prénoms réunis, promettant de secourir les habitants chaque fois qu’ils seraient en danger. Armée d’un bouclier et d’une épée, elle est devenue l’emblème de la ville. Une légende, je vous disais.
Nous reprenons un autre métro puis un tram pour se rapprocher de notre prochain objectif.
Un peu de marche à pied pour traverser le parc Krasinskich où nous découvrons un petit monument inattendu qui permet de visualiser les limites du ghetto dans la ville de Varsovie.
Plus loin, en marchant dans les avenues, nous découvrons d’autres stèles de pierre noire à intervalles réguliers. Elles matérialisent l’emplacement de l'enceinte du ghetto.
Plus que partout ailleurs, Varsovie concentra pendant des siècles l’une des plus importantes communautés juives d’Europe. Estimée en 1939 à environ 400 000 personnes, soit environ un tiers de la population, elle se regroupait naturellement dans certains quartiers de la ville. C’est dans ces quartiers que les Allemands implantèrent le ghetto, appelé officiellement "quartier résidentiel juif", le plus grand de toute l’Europe nazie. Les 400 000 juifs de la ville augmentés de milliers d’autres ramenés d’autres villes du pays y furent enfermés dans des conditions de vie terribles avant d’être transférés vers les camps de concentrations, dont celui de Treblinka tout proche.
Le 19 avril 1943, la résistance au sein du ghetto déclencha un soulèvement que les Allemands mirent 27 jours à écraser. En mai 1945, on ne dénombrait plus que 300 juifs à Varsovie devenue leur ville martyre.
Leur mémoire est entretenue à travers plusieurs musées, de nombreux monuments érigés un peu partout dans la ville et quelques fragments du mur.
Nous avons choisi d’aller visiter le POLIN (qui signifie Pologne en hébreu), un remarquable musée qui retrace 1000 ans d’histoire des juifs en Pologne depuis leur arrivée comme marchands à l’époque médiévale jusqu’à aujourd’hui. Il est installé dans un bâtiment magnifique conçu par un architecte finlandais.
Le musée est remarquable et présente l’évolution de la situation des juifs en Pologne au fil des siècles. Je n’ai retenu qu’une seule photo, celle d’une synagogue reconstituée. On ressort de là un peu sonné par ce qu’on y découvre.
Il est presque 14h quand nous finissons la visite, aussi nous déjeunons sur place à la cafétéria du musée, avant de repartir à l’aventure dans la ville.
Devant le musée, s’élève le monument des héros du ghetto, réalisé avec la pierre qui, ironie de l’histoire, avait été commandée pour bâtir un monument à la victoire nazie.
Un peu plus loin, se trouve un autre monument, l’Umschlagplatz, érigé à l’emplacement d’une ancienne gare d’où les juifs étaient embarqués dans des wagons à destination de Treblinka. Tout en marbre, il comporte 448 prénoms (d’Abel à Żanna) symbolisant les 448 000 juifs du ghetto.
Nous sautons dans un tram qui nous ramène vers la gare centrale où se croisent toutes les lignes de transport en commun.
Cette fois c’est un bus qui nous conduit à proximité du parc Łazienki.
Un très beau parc planté d’arbres magnifiques, chênes, bouleaux, tilleuls et sapins, d’une hauteur impressionnante. Nous voyons quelques écureuils qui n’ont pas l’air très farouches. Il parait qu’il y a même des renards.
Au centre du parc, sur un ilot au milieu d’un bras d’eau relié à la Vistule, a été construit un petit château. Dessiné pour le roi Poniatowski, il fut partiellement endommagé pendant la guerre.
Comme en France, les musées sont fermés le lundi aussi nous nous contentons de l’extérieur et de la terrasse qui le prolonge.
Nous remontons vers l’avenue Marszalkowski pour voir le monument construit à la gloire de Frédéric Chopin.
Ce très joli ensemble en bronze conçu par le sculpteur polonais Waclaw Szymanowski en 1907 représente Chopin sous un saule pleureur qui, sous certains angles, ressemble à une main. Devant la statue, un grand bassin rond, des pelouses et des parterres de fleurs. Il y a aussi beaucoup de bancs car, en été, des concerts sont donnés ici régulièrement.
Il ne reste plus qu’à revenir vers le centre en empruntant un autre bus. Sur le trajet, nous passons au rond-point Charles de Gaulle sur lequel se dresse une immense statue du Général marchant d’un pas viril.
Le bus nous dépose à l’Université. C’est près de là que se trouve la place Pilsudski qui parait d’autant plus immense qu’elle est vide, à l’exception d’un mât portant le drapeau polonais, en son centre.
À l’opposé de la place, sous les arcades de l’ancien palais des Saxe, se trouve le tombeau du soldat inconnu. Il contient les cendres d’un soldat inconnu défenseur de la ville de Lwów (aujourd’hui Lviv en Ukraine) mélangé à de la terre des champs de bataille de la première guerre mondiale. Le tombeau est gardé en permanence par deux soldats relevés régulièrement. Relève qui s’effectue au pas de l’oie.
La journée se termine. Avant de rentrer, nous nous arrêtons pour dîner à l’Aïoli, un restaurant installé sur l’avenue Swiętokrzyska et qui se prétend italien. Mais sa pizza margarita est excellente.
J 13 - Mardi 2 juillet - WARSZAWA - DRUSKININKAI (LT) 398 km
Nous quittons Varsovie sous la pluie. Autoroute pendant presque tout le trajet. À cause de la pluie, nous renonçons à mon projet initial d’aller visiter le parc naturel de la Biebrza. A la place, nous nous arrêtons à Tykocin, petit village endormi au bord de la rivière Narew. Une église de la Sainte Trinité, de jolies maisons traditionnelles en bois sur la grande place, et une ancienne synagogue transformée en musée, une des rares synagogues ayant échappé à la destruction, que nous visitons.
Le guide vert mentionne l’existence à quelques kilomètres, d’une ferme avec cigognes. Plusieurs nids sont installés sur des poteaux et une tour permet de les observer mais dans l’ensemble, ce n’est pas terrible et ne vaut pas les 10 złoty dépensés. D’autant que, comme nous le verrons les jours suivants, les nids de cigognes abondent le long des routes.
Toujours sous la pluie, nous remontons vers le nord-est.
La pause repas se fait à Białystok, ville natale de l’inventeur de l’esperanto. Nous y perdons du temps à trouver un restaurant.
Sur la route vers la frontière lituanienne, nous nous arrêtons à un mémorial.
En juillet 1945, des rafles furent exécutées dans les villages des alentours sur ordre de Staline par le NKVD, des unités de l’Armée Rouge et des milices locales dans le but d’arrêter les résistants polonais à l’occupation soviétique. Suite à ces rafles, plus de 2000 personnes de la région disparurent et des fosses communes furent plus tard découvertes dans les environs y compris dans la Biélorussie toute proche. En 1991, cette nécropole symbolique fut érigée sur cette petite colline pour conserver la mémoire de ces évènements.
Quelques kilomètres plus loin, nous arrivons à la frontière avec la Lituanie. Comme dans toute l’Union européenne, il y a juste un panneau pour indiquer le changement de pays.
Pas de surprise, les paysages sont les mêmes, agréables avec beaucoup de forêts et des cultures.
Nous arrivons à Druskininkai, une très jolie petite ville au bord d’un lac en même temps que le soleil qui refait son apparition. Faute de camping, nous trouvons un excellent hébergement dans une guest-house.
Nous profitons du soleil pour aller nous promener en ville et sur les bords du lac, très bien aménagés et très agréables.
Au hasard de nos pas, nous découvrons quelques originales statues et surtout une très belle fontaine lumineuse et musicale qui a beaucoup de succès.
J 14 - Mercredi 3 juillet - DRUSKININKAI (LT)- VILNIUS 162 km
Tout respire la tranquillité et aussi la richesse dans cette très jolie ville. Belles maisons, larges avenues fleuries et impeccablement propres, circulation paisible, promeneurs à pied ou à vélo. Les bienfaits des eaux de Druskininkai sont connus depuis des siècles. À l’époque de l’URSS, personnes âgées et convalescents y affluaient pour des cures dispensées dans d’immenses sanatoriums. Aujourd’hui, ce sont des citoyens aisés qui viennent se refaire une santé ou profiter du magnifique environnement de la ville.
Nous nous arrêtons d’abord à l’église orthodoxe, à l’étonnante couleur bleue, transfigurée par le soleil matinal.
Nous entrons. Comme dans toutes les églises orthodoxes, il y a quelqu’un qui entretient et surveille les lieux.
Nous allons ensuite à l’autre église, la catholique, à l’aspect bien plus sévère dans son costume de briques rouges.
En revanche, l’intérieur peint en blanc est très clair et très sobre.
Après avoir déambulé encore un moment dans cet agréable environnement, nous reprenons la route pour aller voir un site inhabituel, Grütas Park.
C’est un certain Viliumas Malinauskas, homme d’affaires fortuné, qui créa ce parc où l’on trouve de nombreuses statues datant de l’époque soviétique et qui, lors de l’indépendance du pays, avaient été démontées. Viliumas réussit à convaincre les autorités du pays de ne pas les détruire et il créa en pleine forêt ce parc où l’on se promène sur un sentier bordé de quelques-unes de ces statues colossales, tout à fait typiques de cette époque où les grands leaders Lénine et Staline étaient quasiment considérés comme des dieux et où les soldats et les ouvriers étaient idéalisés. Une démarche qui peut étonner dans un pays qui a tant souffert pendant cette période mais c’est aussi un moyen de rafraichir la mémoire des générations n’ayant pas connu cette période.
On est accueilli par cette impressionnante statue de soldat.
On y trouve aussi une statue de Felix Dzerzhinsky, surnommé, Felix de fer, qui fonda et dirigea la Tcheka, police politique de sinistre mémoire de la toute nouvelle URSS qui envoyait dans les camps du Goulag les "ennemis du peuple" dont la définition était suffisamment vague pour impliquer toute personne dont l’opinion pouvait être considérée potentiellement dangereuse pour le régime.
Plus loin, c’est la statue de Baltušis Žemaitis, général de division d’origine lituanienne ayant servi dans l’armée impériale russe avant de passer dans l’Armée Rouge après la révolution de 1917. Une belle carrière au cours de laquelle il obtint deux fois l’Ordre du Drapeau Rouge et l’Ordre de Lénine, les plus hautes décorations de l’URSS après le titre de Héros de l’Union Soviétique.
Le dernier groupe de statues à la fin du circuit est impressionnant. D’énormes personnages représentant des guerriers, des ouvriers et des femmes aux regards décidés, prêts à se battre pour la rodina, la patrie.
Des miradors plantés ici et là dans la forêt mettent dans l’ambiance.
Des animaux peuvent être admirés dont deux ours, et des jeux pour les enfants en font un lieu fort apprécié localement d’autant que l’environnement s’y prête à merveille.
C’est là que nous pique-niquons au bord de ce magnifique lac.
Nous reprenons la grande route qui file vers Vilnius.
Nous remarquons des voitures garées dans des chemins au bord de la route. Que vendent-ils ? On s’arrête. Ils vendent des champignons ramassés dans la forêt, des bouquets de branches de bouleau qui servent à se fouetter dans le bania pour activer la circulation du sang (les Russes appellent ça le venik) et des bois de renne.
Nous rejoignons ensuite la petite ville de Trakaï en empruntant des routes secondaires qui nous permettent d’apprécier la campagne lituanienne et ses petits villages tranquilles aux jolies maisons de bois.
Je ne résiste pas au plaisir de photographier ce magnifique ciel d’orage.
Trakaï est une petite ville qui occupe une langue de terre de 2 kilomètres qui s’avance dans le lac Galvé. Ses rues sont bordées de maisons de bois peintes de couleurs vives.
Mais la ville est surtout connue pour son très beau château construit sur l’une des îles. On y accède par une passerelle en bois qui offre une vue splendide sur la façade du château.
Le château fut construit par le grand-duc Ghédimin qui y établit sa cour au 14° siècle.
La cour intérieure ouvre sur un long bâtiment dans lequel les pièces ont été aménagées en musée.
Vilnius n’est qu’à 28 kilomètres. Nous arrivons sans problème à l’hostel Bed & Blue où j’ai réservé, aménagé dans une maison ancienne. L’accueil est sympathique, la voiture garée dans un parking protégé. Le cadre est un peu vieillot, la salle à manger et la grande cuisine bien équipée sont au sous-sol mais la chambre est grande et confortable. De plus l’hostel se trouve à quelques centaines de mètres de la vieille ville.
Nous allons faire les courses au très moderne Lidl local et revenons préparer notre dîner.
J 15 - Jeudi 4 juillet - VILNIUS
Nous avons été réveillés par le bruit de la pluie sur les vasistas. Quand nous quittons l’hostel pour aller visiter Vilnius, le ciel est gris et il tombe une petite pluie fine.La cathédrale est le site le plus près de chez nous. L’arkitekatedra basilica se dresse toute blanche au milieu de la grande place. Son clocher est un peu à l’écart car il a été construit sur la base d’une tour des anciens remparts. Son apparence actuelle style néoclassique date de la reconstruction de 1769. Avec son fronton triangulaire orné d’un bas-relief et les grosses statues de saint Stanislas, sainte Hélène et saint Casimir, elle ne donne pas vraiment l’impression d’être une église.
L’intérieur paraît plus grand qu’il ne l’est. Les voûtes très hautes sont soutenues par de gros piliers carrés. Derrière l’autel, un grand tableau représente la mort de saint Stanislas.
Parmi les chapelles qui s’alignent de chaque côté de la nef, il ne faut pas rater celle de saint Casimir, toute de marbre noir, blanc et rose et débordante de sculptures en bois recouvert d’argent des grands ducs de Lituanie et des rois de Pologne. Elle contient le sarcophage d’argent du roi Casimir considéré comme l’un des mausolées les plus imposants d’Europe. Pas moins de treize ans de travail et 600 kg d’argent.
Derrière la cathédrale, s’élève le palais des grands ducs de Lituanie. Ce fut leur résidence à partir du 16° siècle mais le palais fut détruit lors de l’occupation russe en 1795. Le palais actuel a été reconstruit à l’identique en 1998, une manière de renouer avec les grandes heures du pays.
Nous empruntons ensuite la rue Pilies, axe central de la vieille ville qui va de la place de la cathédrale à la porte de l’Aurore. Elle est bordée de belles maisons, de quelques palais et de nombreuses églises.
On peut y voir parmi d’autres, la plus vieille maison de la ville, datant du 16° siècle, bel ensemble de briques rouges que la grisaille de ce matin ne met pas vraiment en valeur.
Nous bifurquons dans l’étroite rue Mykolo où se trouve le très discret musée de l’ambre, installé au sous-sol d’une ancienne maison. Bien sûr, c’est avant tout un magasin où l’on vend de très beaux bijoux et où sont présentées quelques belles pièces, mais l’ambre est très bien expliquée ainsi que l’historique de sa découverte et de son exploitation à travers les âges.
L’église Ste Anne est considérée comme la plus belle de Vilnius. Elle fut construite entièrement en briques entre 1495 et 1501 et sa façade est un chef-d’œuvre d’équilibre et d’harmonie entre les formes courbes et les lignes verticales. En passant à Vilnius lors de la campagne de Russie, Napoléon aurait dit : « si je pouvais la mettre dans la paume de ma main, je la ramènerais à Paris ».
Plus loin, nous empruntons une petite rue sans prétention, la rue Literaty, où l’on peut voir un mur incrusté de petites plaques et d’objets divers, symbolisant la liberté d’expression. Après 50 ans d’occupation soviétique et de censure permanente, les lituaniens sont très sensibles à cette liberté.
Dans cette même rue, nous entrons dans une originale petite épicerie où nous faisons quelques emplettes.
La colline de Ghédimin domine la ville du haut de ses 48 m. Elle se dresse derrière la cathédrale et le palais des grands ducs. Depuis le 13° siècle, elle est surmontée d’une tour de briques rouges que l’on peut atteindre par un escalier ou un funiculaire. C'est par les escaliers que nous grimpons au sommet.
De là-haut, le panorama sur toute la ville et sur le palais des grands ducs en dessous est splendide.
Dans les étages, un petit musée a été aménagé où des vidéos sur la fin de l’occupation russe et l’accession à l’indépendance en 1991 sont présentées, notamment sur la chaîne humaine reliant les 3 capitales. Une exposition très émouvante car on y découvre ce que ces gens ont souffert pour obtenir ce que nous, français, considérons comme acquit et inamovible.
Le 23 août 1989, les habitants formèrent une chaîne humaine de 650 kilomètres qui reliait Tallinn, la capitale de l’Estonie tout au nord à Vilnius, capitale de la Lituanie tout au sud. Au moins deux millions de personnes y participèrent. Pour commémorer ce poignant évènement, sur le parvis de la cathédrale, point de départ de la chaîne, deux empreintes de pied sont imprimées dans une plaque de marbre.
Je dois dire que je suis ressorti de cette visite, presqu’en larmes, ému par les impressionnantes images qui y sont présentées. Nous ne réalisions pas ce que ces populations avaient enduré pendant cette longue période.
Nous remontons ensuite la rue Pilies, allant d’église en église jusqu’à la place Rotušé dominée par les colonnes doriques de l’hôtel de ville. Un grand drapeau ukrainien est étalé sur la façade avec une inscription en lituanien, en ukrainien, en polonais et en biélorusse « pour nous et pour vous, la liberté ».
Parmi les nombreuses églises qui jalonnent le parcours, celle de la Sainte Trinité, orthodoxe, nous attire à cause de sa jolie couleur rose et des gens qui se rassemblent devant. Apparemment, un mariage va avoir lieu. Nous nous approchons.
Et nous entrons dans l’église. Magnifique. Pas forcément du goût de tout le monde mais c’est une débauche de décorations et de couleurs : l’iconostase peint en vert et rehaussé de filets d’or, les icônes omniprésents, le dôme rose et bleu ciel, les grands lustres, tout cela en impose.
Devant l’église Sainte Thérèse où nous ne pénétrons pas, je note encore une coquille qui balise la voie Regia de Moscou vers Compostelle.
Nous passons la porte de l’Aurore, seule survivante des 5 portes de la ville et faisons une boucle à l’extérieur avant de rentrer chez nous en profitant de l’éclaircie qui se dessine.
J 16 - Vendredi 5 juillet - VILNIUS
Deuxième journée à Vilnius qui se déroule sous un soleil un peu timide le matin et qui s’enhardit au fil des heures.Nous commençons par le musée des occupations et des combats pour la liberté, installé dans un grand bâtiment qui fut, tour à tour, QG de la Gestapo puis du KGB.
Ce qui est dénoncé dans ce musée, ce sont les 47 années passées sous le régime communiste et le tourbillon de crimes, d’emprisonnements arbitraires et de déportations qui l’accompagnaient. Les habitants durent subir la suppression de la liberté d’expression, le lavage de cerveau des plus jeunes, une surveillance des moindres faits et gestes, et une répression de ce qui n’était pas conforme au modèle décidé par le Parti Communiste, ce qui pouvait toucher jusqu’à la façon de s’habiller par exemple. Pendant cette période, 200 000 Lituaniens furent emprisonnés, 118 000 à 132 000 furent déportés en Sibérie, femmes et enfants compris, et 21 500 tués dans la guérilla menée contre les troupes soviétiques. Un bon quart des déportés mourut dans les goulags et les camps de travail forcé.
Le parallèle est fait avec ce qui se passe actuellement en Ukraine. Le soutien de la Lituanie et des deux autres pays baltes à l’Ukraine est affiché sans ambiguïté. Partout les drapeaux ukrainiens bleus et jaunes flottent et nous avons même vu au sommet d'un immeuble cette inscription "Poutine, le tribunal international de La Haye t’attend".
Nous ressortons de là un peu secoués.
Pour revenir vers le centre, nous décidons de suivre les bords de la Neris.
Sur le trajet, nous passons devant une magnifique église où un mariage va être célébré. C’est l’église Saint Christophe et Saint Jacques.
Je remarque une nouvelle marque du chemin de Compostelle en bronze fixée dans le ciment du trottoir.
Les bords de la Neris sont agréables et offrent une belle vue sur les quartiers modernes qui se sont construits à l’extérieur de la ville.
Nous revenons vers le centre en suivant la rivière et arrivons au pied de la colline de Ghédimin. La tour est bien plus belle sous le soleil.
À l’orée du parc s’élève la statue de celui qui devint le premier roi de Lituanie, Mindargas. Il était chef suprême de ce territoire où se côtoyaient une population païenne et une autre d’origine slave et de culture russe byzantine. Après avoir vaincu les Chevaliers Teutoniques, craignant une nouvelle croisade, il se convertit au christianisme puis, en 1253, se fit couronner roi par le pape Innocent IV. Mais il fut assassiné par son propre neveu en 1263, ouvrant la porte à un demi-siècle de luttes entre les partisans de l’église allemande et ceux penchant plutôt vers les princes russes et l’orthodoxie byzantine.
Dans le parc, nous remarquons cette originale statue représentant des chiens de chasse.
Pas de pique-nique aujourd’hui mais un excellent repas au restaurant situé dans le parc où nous dégustons l’une des délicieuses spécialités locales, le cepelinai, boulette de pommes de terre farcie d’un mélange de viande et de champignons et servie avec une sauce aigre.
Nous découvrons après coup que ce restaurant était recommandé par le Guide du Routard.
Nous repartons à pied vers l’église Saint Pierre et Saint Paul qui se trouve de l’autre côté de la colline. Sur le chemin, nous tombons sur cette statue représentant les frères Vilešiai, figures fondatrices de la toute nouvelle république lituanienne créée le 16 février 1918, sur les ruines de la première guerre mondiale, défiant ainsi la Russie et l'Allemagne.
L’église qui se dresse au bord d’un grand rond-point n’est pas particulièrement attrayante au premier abord.
Par contre, l’intérieur est une petite merveille baroque. Entièrement blanche, elle est décorée de plus de 2000 statues, de frises, de bas-reliefs et la chaire ressemble à une poterie en céramique. Incroyable, tous ces trésors cachés.
Une marchande de bondieuseries est installée sur le parvis. Nous notons qu’il est possible de payer par carte de crédit. C’est le progrès.
Pour revenir vers le centre, nous décidons de prendre un trolleybus qui nous ramène près de l’arsenal.
Comme le soleil brille, nous revisitons le centre et remontons la rue Pilies en admirant au passage les façades des églises que nous avions dédaignées la veille. Saint Casimir et Sainte Thérèse brillent sous le soleil.
Un peu partout dans la ville, nous avons vu des groupes de jeunes en costumes traditionnels. Renseignement pris, ils sont là pour un festival de musique. Nous prenons en photo l’un de ces groupes particulièrement sympathique.
Puis nous marchons jusqu’à la porte de l’Aurore qui, autrefois commandait la route de Minsk. Côté extérieur, la porte est ornée d’un chevalier blanc entouré de deux griffons, symbole de la Lituanie. Côté intérieur, on peut voir une chapelle derrière la galerie vitrée.
La chapelle Notre-Dame de la Miséricorde qui se trouve au-dessus de la porte de l’Aurore, abrite une icône miraculeuse de la Madone qui daterait du 17° siècle. Elle est l’objet d’une profonde vénération par toutes les communautés chrétiennes, faisant de Vilnius un lieu de pèlerinage majeur. En 1993, pour commémorer la libération du pays, le pape Jean-Paul II y célébra une messe suivie par une foule de fidèles qui se pressaient dans la rue en dessous.
Des milliers d’ex-voto tapissent les murs.
Nous allons voir le bastion de l’artillerie, un ensemble à demi enterré datant du 17° siècle et qui faisait partie du dispositif de défense de la ville.
On y accède par une série de tunnels à la température agréablement fraîche où sont présentées des collections d’armes et d’armures.
Puis nous repassons par l’église Ste Anne magnifique avec l’éclairage du soleil.
Pour finir dans les jardins de la présidence ouverts le soir au public où nous rencontrons un autre groupe de chanteuses en habits traditionnels qui nous adoptent.
J 17 - Samedi 6 juillet - VILNIUS - RĒZEKNE 383 km
Le 6 juillet est le jour de la fête nationale. Aussi, avant de quitter Vilnius, nous allons faire un tour en ville pour voir s’il y a des activités. Pas de défilé bien que l’avenue Ghédimin soit pavoisée, vide et barrée. Nous marchons jusqu’au palais de la présidence. En passant devant le Grand Hôtel, je remarque cette luxueuse Bentley cabriolet garée.
Sur la place devant le palais, une chorale et une musique répètent. Nous restons un moment à les écouter. La chef du protocole en charge de la cérémonie à venir vient discuter avec nous. Elle parle français et connait bien Montpellier où elle est allée il y a quelques années. La cérémonie et le discours du Président auront lieu à midi. C’est trop tard pour nous et on ne peut pas se permettre d’attendre si longtemps.
Aussi nous quittons la ville en direction du nord par la route 102 qui nous mène à la ville de Visaginas à une petite encablure de la frontière avec la Biélorussie. Cette ville ouvrière typiquement soviétique fut construite de toutes pièces en 1975 pour les ouvriers de la centrale nucléaire d’Ignalina aujourd’hui désaffectée. Cette centrale était du même type que celle de Tchernobyl. 5 000 employés s’y relayaient jour et nuit grâce à un ballet de bus. Après l’adhésion de la Lituanie à l’UE, il y eut de fortes pressions pour fermer la centrale, ce qui fut fait en 2009.
Il est théoriquement possible de la visiter mais il faut réserver plusieurs semaines à l’avance et, de toute façon, ce samedi étant férié, ce n’aurait pas été possible. Nous nous contentons de poser devant les bâtiments.
Nous traversons ensuite Visaginas qui a bien l’air de ce qu’elle était.
Nous rejoignons Zarasai et reprenons la grande route vers la Lettonie. Nous remarquons que sur pratiquement toutes les maisons, le drapeau lituanien flotte au vent. Fierté nationale qui est souvent mal vue chez nous.
Nous passons la frontière quelques kilomètres plus loin.
Nous nous arrêtons à Daugavpils, première ville que nous rencontrons.
Deux choses à voir : d’abord la forteresse construite sur les bords de la rivière Daugava dans le style des forteresses de Vauban et qui a vu passer les troupes de Napoléon en 1812.
C’est une véritable petite ville où des gens vivent à côté des restes des casernes d’antan.
Les remparts très bas, à ras du sol, sont entourés de douves autrefois emplies d’eau grâce à la rivière toute proche.
Le point plus intéressant est la porte Nicolas, du nom du tsar Nicolas 1°.
Elle est surmontée de l’aigle à deux têtes, qui figure dans les armes de l’Empire Russe.
Le deuxième centre d’intérêt est la colline aux églises, située à environ deux kilomètres du centre-ville. Sur cette colline, 4 églises se font face : une cathédrale luthérienne toute en briques rouges, la cathédrale catholique de l’Immaculée Conception toute blanche, la cathédrale Saint Boris et Saint Gleb de rite orthodoxe et, la plus belle, l’église Novostroyensky de la Résurrection, de la Sainte Vierge et de Saint Nicolas. Peinte en blanc et bleu ciel, ses bulbes dorés étincellent au soleil.
Un office vient de s’achever et nous entrons voir l’intérieur. Comme toutes les églises orthodoxes russes, elle est assez chargée, avec de nombreuses icones que les fidèles viennent embrasser. Le pope vient parler avec nous et nous invite à entrer et à circuler dans la nef. Les femmes ont toutes la tête couverte d’un voile.
La photo de l’église luthérienne est aussi l’occasion de photographier les trams de la ville qui n’ont rien à envier aux nôtres.
J’avais initialement prévu de m’arrêter à Daugavpils mais pour raccourcir l’étape du lendemain de presque 400 kilomètres, je décide d’avancer sur la route. Sur la carte, j’ai repéré des campings au bord du grand lac Rãznas Ezers, 80 kilomètres plus loin. Il faut emprunter un long tronçon de route non asphaltée pour y arriver.
Le lac est magnifique mais de camping, point.
Comme il est près de 20 H, il ne reste qu’une seule solution, poursuivre jusqu’à la petite ville de Rēzekne où nous nous arrêtons dans un grand hôtel trois étoiles datant vraisemblablement de l’époque soviétique, vu la finition et l’architecture. Mais il nous convient très bien d’autant que nous avons tout le confort pour seulement 45 €. Mais ces détours ont rallongé notre parcours et nous avons finalement roulé 383 kilomètres.
J 18 - Dimanche 7 juillet - RĒZEKNE - TARTU (EST) 271 km
Nous continuons vers le nord par une belle route passant par quelques petites villes, Balvi, Alũksene, Võru et, finalement, Tartu.À la sortie de Rēzekne, nous voyons un panneau "mémorial" indiquant une petite route. Elle mène à un mémorial concernant des massacres perpétrés par les nazis. Sur ce site, près de 8000 personnes, gitans, juifs, Russes et autres, furent exécutés. Le 3 janvier 1942, ce sont les villageois des environs qui furent emmenés là pour subir le même sort. Tous, hommes, femmes, enfants et même bébés furent fusillés après avoir dû eux-mêmes creuser le fossé où ils furent enterrés. Sur le mur du mémorial, une inscription sobre : « Ils sont morts pour vous permettre de vivre ».
Heureusement, la large route ensoleillée qui file tout droit dans la forêt de sapins et de bouleaux nous réserve des images bien plus agréables.
La forêt s’interrompt pour laisser la place à des zones cultivées. Ce sont surtout des céréales. Tout le long de la route, on peut voir de petites fermes où le drapeau letton flotte en haut d’un mât.
De temps en temps, on aperçoit un nid de cigognes installé au sommet d’un poteau téléphonique.
Près d’un carrefour, la jolie couleur de cette petite église nous a incité à nous arrêter pour une photo.
Une autre voiture est arrivée pour déposer trois dames assez âgées qui, de ce que j'ai compris, venaient préparer l’église pour un mariage. Elles nous ont invités à entrer dans l’église. Elles parlaient russe et elles n’étaient pas les premières personnes rencontrées à utiliser cette langue, la langue russe ayant été obligatoire lorsque la Lettonie était une république soviétique et ceux ayant connu cette époque ont gardé l’habitude. Même si je ne comprends pas tout, ça permet de discuter bien plus facilement que s’ils parlaient letton !
Nous entrons à leur suite. L’église est toute décorée de rubans blancs et chaque banc est fleuri d’un bouquet de fleurs des champs. Ces dames s’activent accompagnant leur va et vient de forces génuflexions et signes de croix.
Plus loin, ce sont des tas de troncs coupés, signe d’une exploitation forestière.
Un peu après le village d’Ape, nous entrons en Estonie sans que rien ne permette de savoir que nous avons passé la frontière. Il est vrai que nous roulons sur une petite route secondaire pour éviter de passer trop près de la frontière russe, comme le recommandent des panneaux routiers.
Dernier arrêt pour cet oratoire dont le toit de tuiles vernies brillait sous le soleil. C’est un habitant du village voisin, un certain Vasil Gruntejs, qui l’a fait édifier pour remercier Dieu de l’avoir guéri d’une grave maladie (sic).
Il fait beau et chaud mais il souffle un vent très fort du sud. Ce n’est pas bon signe. En attendant, pour la halte pique-nique, il faut trouver un endroit à l’ombre et à l’abri du vent. Nous nous arrêtons à côté d’une maison de bois inhabitée, protégés par une haie de résineux.
Nous reprenons la route vers Tartu sous un ciel de plus en plus chargé qui finit par cracher quelques gouttes d’eau qui deviennent vite des trombes. À l’entrée de la ville, je m'arrête pour demander au GPS de nous trouver un hébergement. Je choisis le plus proche qui s’avère être un hostel, auberge de jeunesse installée dans un grand bâtiment moderne à côté d’un stade.
Nous y bénéficions d’une chambre avec balcon, les sanitaires étant dans le couloir et une grande et belle cuisine est à notre disposition au rez-de-chaussée pour préparer notre repas.
Quand la pluie s’arrête, il est un peu tard pour aller visiter la ville. Ce sera pour le lendemain.
Nous dînons en compagnie de 4 jeunes Russes peu loquaces.
J 19 - Lundi 8 juillet - TARTU - RAKVERE 278 km
Il ne pleut plus mais le ciel est toujours bien gris et la température est descendue à 17°. Nous allons voir cette ville de 98 000 habitants construite sur les berges de la rivière Emajögi et qui se proclame capitale spirituelle de l’Estonie.Petite promenade au bord de cette tranquille rivière bordée d’espaces verts.
Nous arrivons à la place de l’hôtel de ville bien déserte. On peut y voir la maison penchée, ancienne demeure d’un exilé écossais, qui s’est affaissée en raison des infiltrations de la rivière. L’inclinaison atteint quand même 5°8, ce qui est bien plus que la tour de Pise.
L’hôtel de ville est complètement masqué par une grande scène en cours de montage devant l’édifice. Elle englobe l’une des célèbres statues de la ville, les jeunes gens enlacés sous un parapluie, que l’on ne peut admirer. Il faut aller à l’arrière pour apprécier la façade classique et peinte en rose de ce bâtiment.
Nous grimpons sur la colline Toomemägi qui domine le centre-ville. Cette colline boisée a vu les débuts de la ville au 5° siècle. Aujourd’hui, c’est un agréable parc aux arbres centenaires parsemé de constructions, tel l’ancien observatoire astronomique construit en 1810.
On y voit aussi les bâtiments de l’ancienne université et la cathédrale partiellement en ruine.
Quelques sculptures parsèment la ville. Celle de Johan Skytte est assez curieuse. Johan Skytte (1577 - 1645) était un homme d’état suédois conseiller du roi Gustav II Adolf. C’est lui qui fonda l’université de Tartu considérant que tous, riches ou pauvres, devaient avoir accès à l’enseignement supérieur.
La statue de Nikolaï Pirogov est plus classique. C’était un célèbre chirurgien russe né en 1810, fondateur de la chirurgie militaire et de la Croix Rouge russe qui, entre autres, a inventé l’anesthésie à l’éther et le plâtrage et mis au point une technique d’amputation du pied qui porte aujourd’hui son nom.
Dans le parc Kuunï, c’est la statue "du père et du fils" que certains trouvent dérangeante. Œuvre de Ülo Õun en 1977, elle représente l’auteur et son fils Kristjan âgé de un an et demi. Elle est censée symboliser les liens entre générations et l’évolution de l’espèce humaine.
Après avoir fait nos courses dans un supermarché, nous reprenons la route vers le nord. Notre itinéraire longe le grand lac Peïpous qui sépare l’Estonie de la Russie. Ce lac de 3 555 km2 est le 5° d’Europe par la taille. Il est bordé de grandes plages peu fréquentées et les stations balnéaires qui s’alignaient à l’époque soviétique ont été abandonnées.
En traversant le petit village de Nana, nous nous arrêtons pour regarder un intéressant cimetière russe orthodoxe aux originales tombes parfaitement entretenues.
Malgré l’uniformité des paysages constitués de forêts de pins et de bouleaux et de quelques cultures céréalières, le spectacle est souvent au rendez-vous, en particulier avec les nids de cigognes, toujours installés sur des pylônes à proximité d’habitations.
Et puis, de temps en temps, on rencontre ce panneau inhabituel pour nous « Attention élans » dont nous avions vu quelques exemplaires en Norvège deux ans auparavant. Mais nous n’avons jamais rencontré l’animal en question.
Nous quittons la grande route pour rejoindre Kuremäe, petit village perché sur une colline qui était le site d’un ancien lieu de culte païen. Aujourd’hui s’y dresse le splendide couvent de Pühtitsa.
Les bulbes noirs qui coiffent les tours se voient de loin. L’église date de 1885 et est dédiée à la Vierge Marie.
Les nonnes font partie d’une communauté autosuffisante qui travaille la terre et fait visiter les lieux aux touristes.
Selon la légende, la Vierge serait apparue au 16° siècle à un berger dans un bois de chênes des environs. Puis une icône de la mère de Dieu fut trouvée sous un des chênes. C’est ainsi que le couvent est devenu un lieu de pèlerinage.
Nous rejoignons la côte de la mer Baltique et roulons vers l’est en direction de la frontière russe.
Nous allons à Sillamäe, intéressant témoin de l’Estonie soviétique. La ville a été créée suite à la découverte de gisements d’uranium. Une usine de traitement de l’uranium et autres produits nucléaires fut rapidement construite par 5 000 prisonniers politiques russes et le centre-ville voisin par 3 600 prisonniers de guerre baltes juste après la fin de la guerre. Pendant toute la période de la guerre froide, la ville était inaccessible et n’était mentionnée sur aucune carte.
L’usine ne traitait que l’uranium brut et le projet d’en traiter du plus pur à destination des centrales nucléaires fut abandonné à la chute de l’URSS. La production cessa en 1989 mais les déchets radioactifs sont toujours là, coulés dans du béton près de la mer, ce qui inquiète quelque peu les écologistes et les autres.
Nous allons voir le centre de cette drôle de ville. Larges avenues et grands immeubles sans charme, sauf la mairie qui ressemble à une église luthérienne caractérisent l’agglomération. Face à la mairie, dans un petit parc bien fleuri, s’élève une statue très stalinienne d’un magnifique et héroïque ouvrier particulièrement musclé brandissant à bout de bras le symbole de l’énergie nucléaire.
Nous descendons jusqu’au bord de la mer tellement calme qu’elle ressemble à un lac. Une agréable promenade est aménagée et quelques enfants se baignent.
J’avais bien envie d’aller jusqu’à la ville frontière de Narva où se trouve une belle forteresse, mais l'heure tourne et le temps se gâte. Nous repartons et très vite, rencontrons la pluie. Nous roulons jusqu'à la ville de Rakvere où, faute de camping, nous faisons étape dans une très belle et très discrète auberge perdue dans les bois en périphérie de la ville.
Je m'aperçois qu'il y a très peu de camping en Estonie et qu'on ne les trouve que sur la côte. Partout ailleurs, il faut se tourner vers les hôtels, les guest-houses et autres chambres d'hôtes.
J 20 - Mardi 9 juillet - RAKVERE - TALLINN 149 km
En quittant notre Villa Theresa, nous passons devant les ruines du château de la ville, construit par les Danois au 13° siècle.
Au-dessus du parking où je suis garé, la magnifique statue d’un auroch géant doté d’immenses cornes se détache sur le ciel.
Il s’agit d’une œuvre de Tauno Kangro, un artiste local, pour commémorer les 700 ans de la ville, le choix de cet animal se justifiant par le fait que le nom de la ville signifie tête d’auroch en estonien.
Nous rejoignons le parc national de Lahemaa qui englobe une partie de la côte de la mer Baltique dont les deux péninsules de Käsmu et de Parispea. Un grand coin de nature avec ses forêts, ses lacs et ses rivières mais aussi ses jolies maisons dispersées dans la campagne et ses petits villages devenus touristiques le long de la côte.
Le village de Käsmu en est le parfait exemple avec ses petites maisons pimpantes, son port de plaisance et ses blocs de rochers granitiques dispersés un peu partout.
Sur l’autre péninsule, le petit village de Viinistu ressemble au précédent.
Mais il possède en plus une étonnante galerie de peintures entièrement dédiée aux artistes estoniens et qui s’enrichit au fil des ans. Elle appartient à un riche homme d’affaires du pays et grand amateur d’art, Jaan Manitski, qui présente sa collection au public dans une ancienne usine désaffectée transformée en musée.
Quelques œuvres contemporaines se trouvent à l’extérieur comme ce "tas de cailloux" ou ces "100 valises" de Marko Mäetamm et Kaido Ole.
Nous avons particulièrement apprécié :
Le tigre dévorant une femme pour son réalisme sanglant.
Le tableau de bord de la Création de Maeta, une façon très technocratique de résumer la création du monde.
Et le retour d’Achille de Jaak Arro pour ses couleurs vives.
Notre pique-nique sous les pins en bord de mer s’est terminé avec les premières gouttes d’un orage que nous voyions arriver au-dessus de la mer mais qui n’a pas duré trop longtemps. C’est sous le soleil que nous arrivons à Tallinn, la capitale du pays, une ville moderne et active.
Nous nous installons dans la chambre qui nous est attribuée à l’hostel Fat Margaret’s qui se trouve tout près de la vieille ville.
Profitant du beau temps, nous décidons d’aller voir la fameuse tour de la télévision construite assez loin de la ville entre 1975 et 1980. Dédiée aux télécommunications, elle fut construite pour couvrir les épreuves de voile des jeux olympiques de Moscou 1980 qui se déroulaient à Tallinn. Elle mesure 314 m de haut et comprend une terrasse d’observation et un restaurant panoramique à 170 m du sol. Son ombre s’allonge sur les lotissements de villas qui l’entourent.
L’ascenseur nous amène rapidement à la terrasse d’observation d’où le panorama sur la ville et sur le golfe de Finlande est immense.
Lors des évènements d’août 1991, prélude à l’émancipation de l’Estonie après la chute de l’URSS, la tour fut attaquée par les troupes russes qui voulaient contrôler la diffusion des informations. Mais cette attaque donna lieu à une résistance inattendue des techniciens qui, au péril de leur vie, stoppèrent les soldats russes en bloquant les ascenseurs, maintinrent la liaison avec l’extérieur et rétablirent les émissions de la radio estoniennes.
Un petit monument placé à l’entrée de l’emprise commémore ces actions.
Le plus étonnant lors de cette visite est la comparaison permanente avec la tour Eiffel. Toutes les explications concernent la tour Eiffel, ses origines, sa construction et les péripéties de son devenir. En revanche, il n’y a aucune explication sur la construction de la tour TV elle-même.
Nous reprenons le bus pour revenir au centre-ville et réintégrons notre logis pour préparer le repas dans la cuisine commune, très bien équipée et qui voisine avec une grande salle à manger bien agréable où tout le monde se rencontre. Nous y faisons la connaissance d’une jeune albanaise sympathique. Le bon côté de ce genre d’établissement.
J 21 - Mercredi 10 juillet - TALLINN
La journée est consacrée à Tallinn sous un beau soleil.Nous entrons dans la vieille ville par la porte Marguerite qui se trouve à 200 m à peine de notre hostel qui resplendit sous le soleil.
Dans les espaces verts voisins, un étrange monument consistant en une énorme barre métallique courbe dont une bonne dizaine de mètres sont manquants commémore le naufrage du ferry "Estonia" le 28 septembre 1994 entre Tallinn et Stockholm qui coûta la vie à 852 passagers.
La porte de la vieille ville se trouve tout à côté de l’énorme tour Fat Margaret (Marguerite grasse) qui fait partie des remparts de la ville. Défendre la ville contre les éventuels envahisseurs a toujours été une obsession. Les premiers remparts construits par les Danois étaient en bois. Les fortifications en pierre sont arrivées au 13° siècle et se sont améliorées au fil des ans jusqu’à comporter 3 kilomètres de remparts agrémentés de 8 portes et 66 tours ou bastions crénelés dont il ne reste aujourd’hui que 27 tours et quelques pans de muraille.
Nous entrons dans la ville et remontons la rue Pikk bordée d’immeubles dont certains possèdent de belles façades ouvragées.
Elle passe tout près de l’église Saint Olav dont le clocher remarquablement effilé se voit de loin. Fondée au 13° siècle, elle fut longtemps la plus haute du monde avec un clocher atteignant 159 m de hauteur. Mais la foudre passa par là et détruisit 8 fois l’édifice.
En bonne église passée au protestantisme, l’intérieur a été dépouillé de toute ornementation et ne présente pas grand intérêt.
De ci de là, les drapeaux de quelques pays flottent au vent, marquant la présence de l’ambassade du pays concerné. Au bout de la rue, nous voyons le drapeau blanc bleu rouge bien reconnaissable de la Russie. C’est l’ambassade russe qui est entourée de barrières de sécurité sur laquelle les Estoniens ont déposé affiches, slogans et autres formes de contestation contre la guerre en Ukraine. Une voiture de police est stationnée à côté pour prévenir tout débordement.
L’église du Saint-Esprit se trouve un peu plus loin. Sur la façade, une magnifique horloge datant du 14° siècle qui donne toujours l’heure.
C’est le seul élément qui attire l’œil, la façade étant uniformément blanche.
L’intérieur est plus intéressant. Les galeries en bois décorées de scènes de l’Ancien et du Nouveau Testament, le magnifique retable de 1483 en chêne doré et les superbes vitraux colorés méritent la visite.
Par la porte et la rue de la longue jambe, une rampe creusée à flanc de la colline, nous montons à la ville haute, Toompea, une sorte de citadelle retranchée sur son rocher et dominant le golfe où s’étale aujourd’hui la ville moderne. Ce point haut devint le cœur de la ville dès 1219 après la conquête de l’Estonie par les Danois qui y bâtirent un premier château. En 1347, les chevaliers teutoniques, nouveaux propriétaires, agrandirent et embellirent. La ville haute conserva sa proéminence sociale sur la partie basse de la cité jusqu’à aujourd’hui où ministères et ambassades se partagent les rues avec les magasins de souvenirs.
Dans la montée, je remarque cette belle descente d’eau très originale.
La première chose que l’on voit en arrivant en haut est la magnifique cathédrale orthodoxe Alexander Nevsky et ses coupoles noires.
L’intérieur est, comme dans toutes les églises orthodoxes surchargé d’icônes et peintures.
En face, le château devenu palais avec sa classique façade rose. Mais il s’agit d’une copie de l’ancien château voulu par l’impératrice Catherine II, détruit par les Bolchéviques en 1917.
Nous marchons dans les jardins du gouverneur qui entourent le château qui, outre leur coté bien agréable, offrent une belle vue sur la haute tour de Pikk Hermann qui domine le paysage. Une tour qui date de 1370.
La cathédrale évangélique-luthérienne Sainte Marie se trouve un peu plus loin, long bâtiment blanc surmonté d’un clocher effilé. C’est la plus ancienne église d’Estonie et le seul bâtiment de Toompea à avoir survécu au grand incendie de 1684.
L’intérieur est aussi assez austère, les murs blancs relevés par la présence de nombreuses armoiries en bois sculpté, ciselé et peint, des plus grandes familles nobles d’Estonie.
Dans le côté gauche, on ne peut pas rater les tombeaux en marbre de style Renaissance du favori de Catherine II, l’écossais Samueli Gregio et du baron Adam-Johan de Krusenstern, fondateur de la société de géographie russe, qui fit un tour du monde à la voile par le cap Horn de 1803 à 1806.
La ville haute, par sa situation, propose de magnifiques panoramas sur la ville basse et sur les environs. La chose est connue et tout le monde se précipite sur ces plateformes pour admirer la vue.
Des hauteurs, nous passons dans les profondeurs de la terre en allant visiter les souterrains qui démarrent de la tour Kiek in de Kök. Après avoir descendu des escaliers raides et humides, on chemine dans des couloirs secrets bâtis par les Suédois au 17° siècle pour faciliter les mouvements de troupe et de munitions à l’abri des tirs ennemis.
Plus tard, ils furent utilisés comme abri au moment des bombardements allemands en 1944 puis comme refuge potentiel contre les gaz toxiques ou l’arme atomique au cours de la guerre froide. Plus récemment, ils servirent de refuge aux SDF locaux et de squat à quelques groupes punk. La mise en scène est très réaliste.
En remontant à la surface, on est surpris par la chaleur extérieure tellement il fait frais et humide dans ces passages.
Près de la sortie, s’étend l’immense place de la liberté dominée par la colonne de la victoire dans la guerre d’indépendance, érigée en 2009 en guise de mémorial pour les morts des combats contre l’armée rouge de 1918 à 1920. L’Estonie y défendait son indépendance nouvellement acquise après l’écroulement de l’Empire russe et l’invasion par l’Empire allemand.
Nous revenons vers le centre par la rue Harju. Au carrefour avec Kuninga, la statue de Jaan Kross, écrivain estonien décédé en 2007, nous observe derrière ses lunettes à la Sartre.
Une vendeuse de jus d’orange se précipite vers moi tout sourire. Ce n’est pas pour me vanter sa marchandise ni parce que je l’intéresse particulièrement, mais parce qu’elle a repéré mon T-shirt aux couleurs de la ville de Lviv en Ukraine. Elle est elle-même ukrainienne et originaire de cette ville qu’elle a quitté deux ans auparavant au début de la guerre. Nous discutons un moment de sa vie en Estonie et de notre voyage en Ukraine en 2018.
La place de l’hôtel de ville n’est pas loin. C’est le lieu le plus animé de toute la vieille ville, bordé de vénérables demeures bourgeoises aux belles couleurs pastels.
L’ancien hôtel de ville se dresse lui aussi sur cette place. Premier édifice en dur élevé au 13° siècle, il a été agrandi quand Tallinn intégra la Ligue Hanséatique. Ce magnifique bâtiment de style gothique est resté en usage pendant 5 siècles. Sa tour très effilée ressemble à un minaret. Au bout de la flèche, la girouette représente Van Thomas, jeune soldat nommé gardien de la ville à vie pour sa maîtrise de l’arbalète et devenu un héros légendaire. L’original se trouve maintenant dans les sous-sols de la mairie.
La visite du lieu permet de parcourir la salle des citoyens et la salle du Conseil et ses magnifiques tapisseries.
Au coin de la place, on peut visiter la plus vieille pharmacie d’Europe mentionnée pour la première fois en 1422 et qui n’a jamais cessé son activité. Attenant à la pharmacie, un très intéressant magasin d’antiquités présente de nombreux articles de l’époque soviétique. J’y achète une série d’anciens billets russes pour mon fils collectionneur.
L’église-musée Saint Nicolas était une église gothique du 13° siècle qui fut détruite pendant la 2° guerre mondiale puis reconstruite entre 1953 et 1984. Elle n’a jamais été consacrée et fut transformée en musée. En entrant dans la nef, on est accueilli par un grand candélabre à 7 branches datant du 16° siècle.
Plusieurs œuvres méritent notre attention. Tout d’abord, dans une salle annexe, une fantastique Danse macabre du 15° siècle réalisée sur toile à Lübeck. Seuls 7,5 m de cette tapisserie furent achevés sur les 30 prévus. On y reconnait le pape, l’empereur du Saint-Empire romain germanique, l’impératrice et quelques prélats, surveillés de près par la Mort omniprésente.
Les bas-côtés sont ornés de nombreux blasons dont les couleurs vives ressortent particulièrement bien sur le blanc des murs. Autres pièces remarquables, le magnifique retable doré commandé par la corporation des Têtes Noires ainsi que le quadriptyque sur la vie de saint Nicolas et saint Victor réalisé à Lübeck en 1478. Il comporte plusieurs panneaux latéraux articulés qui s’ouvrent et se déploient en fonction des évènements.
Un ascenseur permet d’accéder au clocher d’où la vue sur la ville est remarquable.
J 22 - Jeudi 11 juillet - TALLINN
Le temps a changé. Le ciel est bien gris et le vent souffle. Mauvais présage.Nous allons visiter le musée de l’occupation et de la liberté situé de l’autre côté de la vieille ville. Aujourd’hui, les rues sont bien plus tranquilles qu’hier où deux bateaux de croisière avaient déversé leur cargaison de touristes dans la ville.
À l’entrée de l’Okupatsioonide ja Vabaduse Muuseum tout en béton, métal et verre, les valises en béton de Marko Mäetamm et Kaido Ole, identiques à celles vues à Viinistu donnent le ton.
Ce musée remarquablement bien fait présente les années les plus sombres de l’histoire du pays, celles de l’occupation par les Soviétiques en 1940 et 1941 puis par les nazis de 1941 à 1944 et à nouveau par les Soviétiques de 1944 à 1991.
Même si le musée se veut dépourvu de rancune et d’animosité envers ses anciens occupants, on comprend mieux l’immense bonheur des Estoniens d'avoir retrouvé l'indépendance et leur satisfaction d’avoir rejoint l’Union Européenne et l’OTAN.
Une seule photo pour ce lieu où nous avons passé la matinée, celle d’une affiche de propagande soviétique pour la fête du 1° mai avec de beaux citoyens bien habillés et heureux, dominés par les portraits du petit père des peuples comme était surnommé Staline, et Mao Zedong, autre dictateur communiste.
Le centre commercial Solaris se tient un peu plus loin. Nous sommes allés y chercher un jeu original découvert à l’hostel et nous en avons profité pour y déjeuner dans une agréable et très moderne cafétéria.
En retraversant la vieille ville pour revenir chez nous, nous découvrons cette statue d’un ramoneur dans la rue Kuninga.
Si nous sommes revenus rue Pöhja, c’est pour prendre le bus 73 qui nous mène à Lennusadan, dans la zone portuaire, où se trouve un magnifique musée maritime. Sous un immense hangar où est entretenue une pénombre bleutée, sont présentés, bateaux, bouées, mines, et autres matériels liés à la mer.
Le clou de l’exposition est le sous-marin Lembit construit en Angleterre en 1936, qui paraît énorme mais ne mesure pourtant que 60 m de long. Quand on pense que les sous-marins balistiques américains ou russes d’aujourd’hui atteignent 300 m !
On descend dans le ventre de l’engin par des échelles très raides et on chemine dans des coursives encombrées de tuyaux, de robinets et autres appareils, sans parler des sas étanches qu’il faut franchir plié en deux. Fascinant. On parcourt la chambre des torpilles, le poste de commandement, la salle des machines, les logements spartiates de l’équipage.
Plus loin, c’est l’hydravion Short 184 qui attire les visiteurs. L’Estonie en acheta 8 à l’Angleterre en 1919 pour des patrouilles maritimes mais aussi pour transporter le courrier entre Tallinn et Helsinki. Ce type d’hydravion fut très utilisé pendant la 1° guerre mondiale pour la lutte contre les sous-marins.
À l’extérieur, sur les quais, c’est la fête foraine. Stands de jeux et diverses attractions, vendeurs de confiseries, de souvenirs, de poissons séchés. Nous sympathisons avec le Capitan qui vend plusieurs sortes de poissons que nous n’arrivons pas à identifier. Il semble qu’il y ait des maquereaux et des sardines. Quant aux autres...
Des bateaux sont exposés, dont plusieurs patrouilleurs ou chasseurs de mines ayant appartenus à la Marine Estonienne et aussi de grands et superbes voiliers qui sont rassemblés là pour participer à une course en mer lors du week-end à venir.
Nous buvons un excellent café colombien préparé par une vendeuse finlandaise très sympathique.
Sur une scène installée sur les quais, une chorale est en train de répéter, ce qui attire l’attention d’Hélène, elle-même membre d’une chorale montpelliéraine.
Après avoir regardé et écouté les dernières répétitions, nous assistons au spectacle d’une chorale de jeunes filles qui ne doivent pas avoir plus de 15 ans. Un très joli spectacle de chants agrémentés par une originale chorégraphie.
Il ne nous reste plus qu’à reprendre le bus pour revenir près de chez nous. Avant de rentrer, nous allons faire les courses au supermarché voisin en vue du repas du soir et du pique-nique du lendemain.
Ce soir à la cuisine, en préparant notre repas, outre l’Albanaise, nous sympathisons avec une Coréenne et une Indonésienne. Nous adorons les auberges de jeunesse pour ces opportunités de rencontre.
J 23 - Vendredi 12 juillet - TALLINN - KURESSARE 154 km
Nous quittons Tallinn sous le crachin pour rejoindre Rohukula, port d’embarquement pour rejoindre les îles.L’Estonie comprend deux grandes îles au large des côtes occidentales, Saaremaa et Hiiumaa.
Saaremaa est la plus grande et est à peu près équivalente au Duché du Luxembourg, Hiiumaa faisant moins de 1000 km2. Les deux îles sont en partie recouvertes de bois de pins, d’épicéas et de genévriers et sont ponctuées de phares, de moulins à vent et de minuscules villages tranquilles. Les habitants de Tallinn y viennent régulièrement en vacances ou en week-end pour respirer l’air marin et se détendre.À Haapsalu, nous nous arrêtons pour voir les restes du château ainsi que la gare qui acquit une certaine célébrité car c’était le terminus des trains amenant de Saint-Pétersbourg les aristocrates russes venus prendre les bains.
Elle était spécialement aménagée avec un long quai couvert pour que les distingués voyageurs descendant du train ne se mouillent pas en cas de pluie.
Plusieurs loco à vapeur anciennes sont stationnées sur les voies. Mais elles ne sont pas en très bon état.
À Rohukula, nous embarquons sur le ferry Leiger qui nous emmène en 1h30 à Heltermaa sur l’île d’Hiiumaa.
Sur le trajet, nous passons près d’un îlot au ras de l’eau. Décidemment, la mer Baltique n’est pas très profonde.
Et à mi-parcours, nous croisons le deuxième ferry qui fait la traversée en sens inverse.
L’arrivée à Heltermaa sur l’île d’Hiiumaa se fait en douceur et le débarquement est rapide.
À peine descendus du bateau, nous quittons le grand axe et trouvons un petit coin sympa pour déjeuner.
L’île est toute plate avec à peine quelques ondulations et elle est couverte de bois de pins et de cultures.
Nous remontons vers le nord de l’île. Après Kardia, la plus grande ville de l’île, où nous faisons nos courses, nous nous arrêtons quelques kilomètres plus loin à la colline des croix.
Jusqu’à la fin du 18° siècle, l’île était majoritairement peuplée de fermiers suédois. Ils en furent chassés sur ordre de Catherine la Grande et furent envoyés dans le sud de l’Ukraine. En ce lieu isolé dans une vaste forêt de pins, les derniers Suédois à quitter l’île en 1781 firent une ultime prière avant d’embarquer. Depuis, il est de tradition que les personnes visitant l’île pour la première fois viennent y accrocher une croix faite de bois ramassé sur place.
Autres curiosités de l’île, les phares installés sur les pointes nord et ouest. Nous allons en premier à celui du nord, sur la presqu’île de Tahkuna dont les côtes sont parsemées de rochers.
Le phare fut mis en œuvre en 1875. Il mesure 43 m de haut et est constitué d’une structure métallique construite en France deux ans auparavant, probablement par les ateliers Eiffel.
Devant le phare, un monument rappelant la catastrophe du "MS Estonia" a été érigé car c’est l’emplacement le plus près de l’endroit où eut lieu la catastrophe.
Dans la forêt, on peut encore voir des blockhaus de la 2° guerre mondiale construits par les Soviétiques pour faire face aux Allemands.
Nous rejoignons ensuite la presqu’île de Köpu sur laquelle deux phares ont été construits. Le premier, construit en pierres en 1531 à la demande de la Ligue Hanséatique est le troisième plus vieux phare du monde. Il ne mesure que 37 m de haut mais se trouve à 102 m au-dessus du niveau de la mer. Toujours en fonctionnement, il est maintenant entièrement automatisé.
Le deuxième a été construit plus avant sur la pointe en 1871 sur ordre de l’empire russe car le brouillard sévissant parfois sur la zone rendait le phare de Köpu inefficace. Il est constitué de deux cylindres d’acier renforcés par des structures métalliques extérieures, l’ensemble ayant été aussi fabriqué en France chez Eiffel. En 1920, il fut recouvert d’une couche de béton.
À la fin du 19° siècle, il y avait plus de 500 moulins à vent sur l’île de Hiiumaa mais peu ont résisté à l’usure du temps. Celui de Kakia a été restauré en 2001, ce qui nous permet d’admirer aujourd’hui sa jolie silhouette.
Nous rejoignons Söru à la pointe sud où nous prenons un autre ferry pour rejoindre l’île de Saaremaa.
Une petite demi-heure est nécessaire pour atteindre Triigi sur la côte nord de l’île de Saaremaa.
Il ne nous reste plus qu’à rejoindre le camping de Tehumardi tout au sud après avoir admiré en passant les 4 moulins à vent en parfait état du village d'Angla.
Le camping de Tehumardi est très agréable, situé sur un immense terrain sous les pins et disposant de tout le confort. La plage de galets se trouve à quelques centaines de mètres de l’autre côté du bois de pins.
Nous y apprécions la fraîcheur du soir et le calme du lieu.
J 24 - Samedi 13 juillet - KURESSARE - PÄRNU 359 km
Au réveil, nous découvrons que le brouillard s’est installé, voilant la visibilité et apportant son lot d’humidité.Près du camping, un mémorial a été érigé par les Russes pour commémorer des combats sanglants qui se sont déroulés dans les environs le 8 octobre 1944 entre des forces estoniennes et des forces allemandes. Les combats acharnés se sont déroulés dans l'obscurité totale de la nuit et les pertes furent élevées des deux côtés.
Le monument en béton a été érigé en 1967 dans le plus pur style soviétique.
Nous roulons jusqu’au bout de la péninsule de Sŏrve, un mince cordon de terre qui s’avance dans la mer. La brume toujours présente donne un éclairage particulier et cache en partie le sommet du phare.
Nous marchons jusqu’au bout de la langue de terre alors que le brouillard commence à se dissiper. Un vrai bout du monde.
Puis nous allons aux falaises de Panga, autre bout du monde mais nettement plus peuplé. Petites falaises d’une vingtaine de mètres et grand panorama sur la mer Baltique peu profonde au pied. Le site n’est pas extraordinaire mais il y a un original cadran solaire et une belle balançoire pour Hélène.
Le cratère de météorite de Kaali est un site peu courant. L’Estonie présente la plus grande concentration au monde de cratères de météorites dûment répertoriés. Sur ce site, on peut voir un lac parfaitement circulaire d’une centaine de mètres de diamètre et de 22 m de profondeur formé par l’impact d’une météorite il y a au moins 4 000 ans. On estime que l’objet pesait entre 20 et 80 T et qu’il s’était brisé en plusieurs morceaux à une altitude de 5 à 10 kilomètres, formant huit cratères de 12 à 40 m de diamètre toujours visibles aux alentours. 81 000 m3 de roches auraient été déplacés par l’impact qui aurait provoqué un dégagement de chaleur ayant carbonisé toute végétation dans un rayon de 6 kilomètres.
À Kuressaare, la plus grande ville de l’île, il faut voir le château épiscopal construit sur une île artificielle entourée de douves face à la mer. S’il y a eu un château en 1260, celui qui est visible aujourd’hui ne date que du 14° siècle, certaines parties n’ayant même été ajoutées qu’au 18°. Remparts massifs, tours, pont-levis et douves emplies d’eau, tous les ingrédients sont là.
Un grand parc ombragé très agréable entoure les douves. Plusieurs établissements thermaux et quelques hôtels de luxe y ont été installés.
Sur le trajet vers le port d’embarquement, nous passons voir l’église de Poïde qui fut le quartier-général des chevaliers Porte-Glaive de Saaremaa aux 13° et 14° siècles. Pillée et abandonnée à l’époque soviétique, elle accueille aujourd’hui diverses congrégations mais sa façade assez délabrée n’encourage pas la visite. Quand nous arrivons, une bonne vingtaine de voitures sont stationnées devant l’église. Un concert est en cours et il n’est donc pas question de visiter. Mais il n’y a pas grande chose à voir de toute façon.
À Orissaare, c’est le chêne planté au milieu du terrain de foot qui attire l’attention. Vieux de plus de 150 ans, il bénéficie d’une aura un peu mystique d’autant que les autorités ne réussirent pas à l’arracher. Il fut élu "arbre européen de l’année" en 2015. Lors des matches, les joueurs se contentent de le contourner.
Voilà, circuit terminé, nous rejoignons l’embarcadère pour prendre le ferry qui va nous ramener sur le continent au port de Virtsu.
Une petite centaine de kilomètres d’excellente route nous amène à Pãrnu. La pluie annoncée est déjà là.
Nous bénéficions d’une éclaircie en arrivant à Pãrnu. Le camping où j’avais prévu de m’arrêter ressemble plutôt à un parking plein de camping-cars et de caravanes mais j’arrive à glisser ma tente dans un petit coin bien à l’abri sous les chênes. Finalement tout se passe bien. La tente est montée et le repas pris dans la salle à manger bien aménagée du camping sans que la pluie ne nous ait gêné. Ce n’est que dans la nuit que nous entendons quelques gouttes marteler la toile de la tente.
J 25 - Dimanche 14 juillet - PÃRNU - RIGA 334 km
Au réveil, il ne pleut pas et le temps semble s’éclaircir. Comme nous étions bien protégés sous les arbres, la toile est à peine mouillée.Nous allons visiter Pãrnu, station balnéaire réputée qui continue d’attirer les familles estoniennes mais aussi des touristes finlandais, suédois et allemands.
Le centre historique comprend quelques rues bordées de belles maisons anciennes en bois.
Puis, nous sommes attirés par les dômes et clochers verts de l’église orthodoxe Sainte Catherine, du nom de l’impératrice Catherine II. L’intérieur avec ses icônes et ses panneaux argentés est splendide.
Près de là, les murs roses et blancs de l’église luthérienne Sainte Elisabeth brillent au soleil.
En route vers la plage, nous découvrons les thermes où les curistes venus de la Russie impériale venaient prendre des bains de boue. Ils ont cédé la place à un luxueux hôtel spa.
L’immense plage de sable bien agréable sous le soleil revenu est le principal attrait de la ville. Elle est bordée par les jardins du Rannapark agrémentés de fontaines et de bancs.
Mais la couleur vert-marron de l’eau ainsi que le vent froid n’incitent pas à la baignade.
Nous quittons la ville et filons plein est vers l’intérieur des terres. Nous faisons une halte pique-nique dans les bois sur la route vers Viljandi.
Surplombant la vallée, Viljandi est une ville bien tranquille.
La place de l’hôtel de ville est dominée par le monument aux morts de la guerre d’indépendance.
Plus loin, c’est l’église luthérienne Saint Jean datant du 17° siècle dont l’intérieur est d’une sobriété bien luthérienne. Elle servit d’entrepôt de meubles sous le régime soviétique.
Une belle statue équestre s’élève près de l’entrée du château. C’est celle du général Johan Laidoner qui fut commandant en chef de l’armée estonienne pendant plusieurs années entre 1918 et 1940 et qui fit également une belle carrière politique au sein du gouvernement estonien. Mais après l’invasion du pays par l’Union Soviétique en 1940, il fut déporté et mourut en prison en Russie.
Le château s’élève sur une colline au cœur d’un joli parc mais il n’en reste que quelques pans de mur et des fondations délabrées. Il fut construit en 1224 par les chevaliers Porte-Glaive, encore eux, à l’emplacement d’une précédente forteresse datant du 9° siècle.
J’ai déjà mentionné les chevaliers Porte-Glaive. Parfois appelés Frères de l’armée du Christ, c’était un ordre militaire catholique similaire à l’ordre du temple de Jérusalem, créé en 1202 pour christianiser les populations baltes. Ses moines soldats étaient originaires du Saint Empire romain germanique. Plus tard, ils s’intégrèrent à l’ordre des Chevaliers Teutoniques.
A la sortie de la ville, nous nous arrêtons voir le cimetière allemand qui contient des centaines de tombes de soldats morts pendant la 2° guerre mondiale.
Nous passons la frontière Estonie - Lettonie où il n’y a même pas de panneau pour signaler le changement de pays. Il faut dire que nous roulons sur une petite route de campagne.
Nouvel arrêt à Cĕsis pour visiter un autre château. Une forteresse qui fut fondée en 1214 par l’ordre de Livonie (autre nom des Porte-Glaive) et fut détruite par le tsar russe Ivan le Terrible en 1577. Elle voisine avec un manoir du 18° siècle qui fut la demeure d’une dynastie de comtes allemands.
Pour visiter la grosse tour ouest, on nous distribue de petites lanternes contenant une simple bougie car les escaliers en colimaçons qui grimpent dans la tour sont sans fenêtre. Ambiance moyenâgeuse.
Il ne reste plus qu’à avaler les 80 km restant par une jolie route très bucolique pour rejoindre Riga, la capitale de la Lettonie.
L’auberge où j’ai réservé se trouve dans un quartier résidentiel. Rue large bordée d’arbres et d’un mélange de maisons cossues et d’autres un peu plus délabrées.
L’auberge n’a pas vraiment l’air d’en être une. L’accueil n’est pas très sympa avec une gérante revêche qui ne parle que russe et ne fait aucun effort pour se faire comprendre.
La chambre est bien mais le reste de la maison est plutôt sombre et donne l’impression d’être restée à l’époque soviétique. Pas de jeunes ici comme à Tallinn, juste quelques autres clients peu loquaces et à l’air un peu bizarre.
La cuisine n’est pas très bien équipée et est assez en désordre.
On y fait la connaissance d’un ouzbèke au langage hermétique.
J 26 - Lundi 15 juillet - RIGA
Sous un beau ciel bleu, nous partons à la découverte de cette ville.Riga est à la hauteur de ses deux voisines. Un peu plus grande avec plus de 600 000 habitants, elle propose le même cœur historique pittoresque que ses deux sœurs Vilnius et Tallinn, et a la chance de bénéficier en plus d’un magnifique quartier de luxueux immeubles Art Nouveau quasiment unique. Il y a donc beaucoup à voir.
Nous prenons le tramway pour rejoindre le centre-ville car notre hostel est un peu excentré.
On franchit le pont Akmens sur la Daugava, grand fleuve qui coupe la ville en deux mais qui a fait la fortune de la ville en d’autres temps car les bateaux pouvaient remonter jusque-là. Près de l’arrêt de tram, se dresse la statue des fantassins lettons qui a été érigée en hommage aux soldats lettons qui sont tombés au cours de la guerre d’indépendance en 1915 - 1920. Une belle statue bien qu’assez massive.
Tout à côté, se trouve la place Rãtslaukums dominée par la façade classique surmontée d’un beffroi de l’hôtel de ville. Le bâtiment, comme tout le centre-ville fut gravement endommagé par les bombardements allemands de juin 1941 et les ruines furent même rasées par les soviétiques en 1954. Ce n’est qu’en 1999 qu’il fut reconstruit.
Au milieu de ce désastre, seule la statue de Roland qui trônait au milieu de la place survécut. Roland, qui combattit pour Charlemagne dans la région avant d’aller guerroyer en Espagne, était un symbole de justice et de liberté pour les villes de la Hanse.
La maison des Têtes Noires est l’une des merveilles de Riga. Le bâtiment original fut érigé en 1344 par la puissante confrérie des Têtes Noires. Elle fut baptisée ainsi car son emblème était une tête d’africain, allusion directe aux origines égyptiennes de saint Maurice, le saint patron de la Guilde, une association de riches marchands célibataires.
Remaniée plusieurs fois au cours des siècles, la façade fut reconstruite en briques et pierres à la fin du 16° siècle dans le style de la renaissance flamande, avec ses statues, ses blasons et reliefs polychromes, style que l’on retrouvait dans les villes hanséatiques bordant la mer Baltique.
Mais en juin 1941, elle fut totalement détruite par un bombardement allemand puis rasée par les autorités soviétiques en 1948. Ce n’est qu’en 1995 que les Lettons devenus indépendants décidèrent de la reconstruire à l’identique d’après des gravures et des plans retrouvés. Les travaux furent terminés en 1999, ce qui nous permet aujourd’hui d’admirer cette merveille.
Tout a été refait dans les moindres détails, des bas-reliefs multicolores de l’entrée, aux statues des dieux grecs et à la magnifique horloge astronomique qui ornent la façade.
Nous entrons visiter cette incroyable maison.
Dans les sous-sols où sont présentés des objets anciens, je remarque une tapisserie qui représente sans erreur possible, la Cité de Carcassonne. Etonnant. Comment cette image pouvait-elle se trouver ici au 14° siècle ?
Au premier étage, nous voyons la salle de Lübeck, nommée ainsi en raison des liens étroits entretenus depuis toujours par Riga avec cette ville allemande, les deux faisant partie de la Ligue Hanséatique. On peut y admirer un magnifique plancher, un remarquable tableau représentant la ville de Lübeck, des vitraux arborant la tête de maure et des lustres en cristal de Bohème.
À côté, l’immense salle de réception est tout aussi luxueuse avec les mêmes parquets ouvragés, la galerie de portraits et les armoiries des Têtes Noires. Dans cette salle, Richard Wagner, Ferenc Liszt et d’autres musiciens célèbres donnèrent des concerts.
Le plafond est décoré d’une extraordinaire peinture représentant "l’apothéose de saint Maurice" figuré au centre en uniforme de la Légion égyptienne, entouré d’allégories de la victoire et du commerce et des dieux Mars et Neptune.
Nous continuons notre visite de la vieille ville par l’église Saint Pierre qui dresse son clocher à bulbe et sa flèche à 123 m de haut. La nef toute en briques est très sobre et son étroitesse la fait paraître plus haute qu’elle ne l’est.
Il ne faut pas rater la montée au clocher d’autant qu’un ascenseur facilite grandement la tâche. De la plateforme à 72 m de hauteur, on jouit d’un beau panorama sur la ville. D’un côté, on peut voir la cathédrale et le pont Vansũ enjambant la Daugava, de l’autre, la vue porte jusqu’aux hangars où se tient le marché, l’immeuble stalinien de l’Académie des Sciences et, dans le lointain, la tour de la télévision.
Pour changer un peu des églises, nous allons voir la synagogue qui se cache dans un bâtiment très discret rue Peitavas. Elle fut édifiée en 1905 et est la seule synagogue ayant échappé à la destruction mais fut utilisée par les nazis comme entrepôt.
De l’autre côté des voies ferrées, se tient l’un des plus grands marché d’Europe installé dans 4 immenses hangars ayant servi à abriter des dirigeables Zeppelin en 1930.
On y trouve tout et on ne peut que s’extasier devant les étals de cerises, framboises et autre myrtilles, les bocaux d’énormes cornichons ou les étalages des poissonniers où voisinent anguilles fumées, harengs, caviar et poissons panés. C’est dans cette ambiance joviale et parfumée à souhait que nous faisons la pause.
Après ce petit repas bien agréable, nous revenons vers le centre-ville en longeant le fleuve, ce qui nous fait passer sous le pont de la voie ferrée.
Nous arrivons place de la cathédrale où l’on tombe sur une étonnante statue en bronze d’un tatou. Au fond, s’élève la belle façade rouge et ses figures allégoriques de l’ancienne Bourse devenue musée.
Le quartier médiéval autour de la cathédrale fut rasé en 1935, ce qui dégage bien la vue sur la cathédrale et sur les intéressantes façades qui entourent la place.
La cathédrale, catholique à ses débuts, fut édifiée en 1211 dans le style roman avant d’être modifiée selon le style gothique et de devenir luthérienne. On peut d’ailleurs retrouver les différents styles architecturaux dans différentes parties de l’immense édifice.
Elle n’a pas grand-chose d’exceptionnel en soi mais on peut admirer l’orgue monumental de 1884 qui, avec 25 m de large, 10 de haut, 124 registres et 6 768 tuyaux, était à l’époque le plus grand du monde. Méritent aussi le coup d’œil, la chaire de 1671 et les fonds baptismaux du 12° siècle installés à la croisée du transept.
Parmi les éclatants vitraux, l’un d’eux représente la réception du roi de Suède Gustave II Alphonse par les autorités de la ville en 1621 avec Martin Luther en médaillon.
Dans un bas-côté, on peut voir un vieux coq girouette datant de 1595. Sa particularité est d’avoir un côté doré et l’autre noir. Autrefois, lorsque le côté doré était visible du centre-ville, cela signifiait que les vents étaient favorables à l’arrivée des bateaux marchands.
Attenant à la cathédrale, on fait le tour du grand cloitre en briques rouges, bel endroit tranquille à l’écart des foules.
L’architecture de cette ville est toujours surprenante, témoin cette sculpture au coin d’une rue.
Nous arrivons sur la place Līvu, elle aussi entourée de belles façades, dont celles de la Grande et de la Petite Guildes, associations regroupant tous les gros marchands et négociants allemands de la ville.
Presqu’en face, on peut voir une maison avec une tourelle d’angle chapeautée d’un toit en cône sur lequel est posé un chat. Ce chat fut installé là par un riche marchand qui s’était vu refuser son adhésion à la Guilde. Pour se venger, il plaça le chat sur son toit, le postérieur tourné vers la Guilde. Outragée, celle-ci fit un procès et obtint que le chat soit tourné dans une autre direction…
Dans la rue Marzã Pils, on découvre les trois frères, trois maisons jointes faisant cohabiter trois styles différents. On peut noter les petites fenêtres dues à l’impôt sur les ouvertures en vigueur à l’époque et le drapeau de l'Ukraine aux cotés du drapeau national.
Dans le prolongement de la place Līvu, on emprunte la grande rue Brīvības qui mène à la statue de la liberté, érigée en 1935. Au sommet d’un obélisque de béton dont la base est ornée de statues assez massives faisant référence à l’histoire du pays, une femme élancée brandit trois étoiles qui symbolisent les trois provinces de la Lettonie. Sur le socle, une devise claire et nette "patrie et liberté". Les Soviétiques voulurent détruire ce monument mais Madame Khrouchtchev s’y opposa, ce qui n’empêcha pas de mettre en place une surveillance permanente pour que personne ne vienne y déposer des fleurs.
On n’en voit que très peu mais les policiers sont quand même là.
Derrière le monument de la liberté, s’ouvre le parc de l’esplanade. Nous y faisons une pause à l’ombre des arbres avec les dômes étincelants de l’église de la Nativité face à nous.
Des différentes statues que les Soviétiques avaient érigées dans ce parc, une seule subsiste, celle du poète Rainis, en granit rouge. C’était un grand poète letton connu aussi pour son opposition au tsar.
Nous prenons le bus pour revenir sur la place de l’hôtel de ville.
Nous nous approchons d’un petit sapin en bronze installé sur la place près de la maison des Têtes Noires et auquel nous n’avions pas prêté attention précédemment.
Les membres de la confrérie des Têtes Noires, de riches marchands célibataires étaient connus pour leurs excès en tous genres. Une veille de Noël 1510, quelques-uns, bien éméchés, avaient tiré un grand sapin jusqu’à la confrérie, l’avaient couvert de fleurs et y avaient mis le feu, ce qui avait provoqué un bel embrasement. Depuis cet évènement, la décoration de "l’arbre de Noël" est devenue une tradition qui a fini par se diffuser dans le monde entier.
C’est pour célébrer cette "première" que fut placée cette plaque indiquant l’endroit où fut dressé le premier sapin décoré. Tout autour, l’explication est gravée dans la pierre en plusieurs langues dont le français, le letton bien sûr, l’anglais, l’espagnol, le russe et deux autres langues asiatiques, chinois, japonais ou coréen.
Après avoir dîné à la terrasse d’un sympathique restaurant sur la place il ne reste plus qu’à rentrer chez nous. Nous décidons de traverser à pied le grand pont Akmens.
Au loin, la silhouette du grand pont suspendu Vansũ se détache sur le soleil couchant tandis que de l’autre côté du fleuve, la silhouette grise de la bibliothèque nationale nous fait irrésistiblement penser à la Grande Pyramide de La Grande Motte.
On aperçoit au loin la silhouette bien reconnaissable de l’immeuble de l’Académie des Sciences, semblable bien que plus petit, à celui de Varsovie que nous avions vu quelques jours auparavant, et à celui encore plus imposant de Moscou.
Sur le pont, je remarque les oriflammes faisant la publicité du rallye de Lettonie inscrit au championnat du monde, qui aura lieu le week-end suivant. J’avais pensé le regarder pendant deux jours mais cela compliquait mon programme et j’y ai renoncé.
On embarque dans le tram pour rentrer chez nous.
J 27 - Mardi 16 juillet - RIGA
Deuxième journée à Riga.Nous allons voir le quartier Art Nouveau.
L’Art nouveau est né entre 1890 et 1900 pour s’opposer à la fabrication industrielle en introduisant de l’art dans la vie sociale. Cette mode se répandit rapidement dans toute l’Europe, touchant tous les domaines, de l’artisanat aux arts décoratifs et à l’architecture. Progressivement, le style devint de plus en plus exubérant, avec l’apparition d’animaux mythiques, de guirlandes de fleurs, de fruits ou de feuillages, de divinités antiques et autres personnages. Pour une raison inconnue, Riga possède la plus grande concentration d’Art nouveau du monde, la plupart des immeubles concernés se trouvant dans un quartier délimité par les rues Alberta et Elisabetes.
Pour y aller, nous prenons un tram qui nous dépose devant le Théâtre National. C’est là que fut déclarée la première indépendance de la Lettonie le 18 novembre 1918.
A être dans ce quartier, nous allons voir les anciennes fortifications de la ville dont il ne reste plus grand-chose, un bout de rempart soigneusement conservé et la tour rouge qui était l’une des 28 tours de l’enceinte.
Près de là, une belle façade sur laquelle sont peints tous les blasons des villes de Lettonie.
Et dans un square voisin, encore une publicité pour le rallye de Lettonie. De quoi me faire regretter d'avoir renoncé à aller le voir passer dans les pistes forestières.
Cette partie nord de la vieille ville est bordée par un parc très agréable et un canal qui est un ancien bras du fleuve où beaucoup de gens viennent profiter de l’ombre des arbres et des pelouses.
Nous arrivons sur une grande place où se dresse une colossale statue d’un écrivain letton, un certain Andrejs Upits (1877 - 1970) qui fut surtout connu pour ses sympathies communistes qui l’amenèrent au poste d’adjoint du secrétaire général du Soviet Suprême de la République de Lettonie.
Il y a aussi une vingtaine de drapeaux ukrainiens.
Tout s’explique. Au bout de la place, sur l’avenue Raiņa Bũlvaris, se trouve l’ambassade russe. Les drapeaux ukrainiens sont là à son intention, tout comme le portrait satyrique de Poutine dans la rue voisine.
Nous arrivons dans la rue Alberta où se concentre quelques-uns des plus beaux immeubles Art Nouveau de Riga.
Mais ces immeubles bien particuliers ne se trouvent pas que dans cette rue. Un peu partout, on en voit dans les rues avoisinantes, tel ce bel hôtel au carrefour de la rue Elisabetes et Antonijas.
Ou cet autre immeuble un peu plus loin dans la rue Antonijas.
Nous visitons le musée de l’Art Nouveau situé dans la rue Strĕlnieku. On y voit un appartement reconstitué de cette belle époque où l’on parcourt plusieurs pièces aux beaux meubles.
Des habits et des chapeaux 19° siècle sont mis à disposition pour prendre des photos souvenir. Hélène se plie au jeu en compagnie d’une jeune asiatique américaine très sympathique.
La cage d’escalier de l’immeuble est aussi une petite merveille de l’Art Nouveau.
Notre quête des beaux immeubles continue dans le quartier. Même l’ambassade de France est située dans un immeuble Art Nouveau.
Nous décidons d’aller voir deux autres attractions de la ville. L’académie des sciences, le cadeau empoisonné de Staline à la Lettonie, immeuble grandiose copie miniaturisée de celui se trouvant à Moscou et semblable à celui que nous avions vu à Varsovie quelques jours auparavant.
Malheureusement il est fermé et on ne peut donc monter à la terrasse panoramique admirer le point de vue sur la ville. Le seul intérêt du lieu.
Déçu, nous allons jusqu’au musée du ghetto de Riga qui se trouve près de là.
Je n’ai pas aimé ce lieu qui raconte avec des témoignages de survivants la période de l’occupation nazie et la traque des juifs de Lettonie et leur extermination dans les camps établis à proximité. Je n’ai pris qu’une seule photo, le wagon installé dans la cour qui symbolise le transport de tous les juifs déportés vers les camps.
Peut-être est-ce parce que nous avions visité le très beau musée de Varsovie consacré aux juifs. On n'a pas vraiment envie de revoir les horreurs qui sont présentées un peu partout. C’est un peu la même chose pour les musées concernant l’occupation soviétique que l’on trouve dans les trois capitales. Nous avons vu celui de Vilnius et celui de Tallinn et n'avons pas essayé de voir celui de Riga.
Nous reprenons un tram pour revenir au centre-ville. Il ne nous reste plus grand-chose à voir. Le château de la ville qui ne se visite pas car c’est la résidence du président de Lettonie. Le drapeau national flottant au sommet de la tour signifie qu’il est présent.
Avant de rentrer, nous repassons place de l’hôtel de ville voir encore une fois la merveille, la maison des Têtes Noires et sa magnifique horloge astronomique.
Voici le tram n°1. Nous embarquons. Adieu belle ville de Riga.
J 28 - Mercredi 17 juillet - RIGA - KULDIGA 298 km
Nous quittons cette belle ville qui nous a enchantés pour suivre la côte.Nous passons par Jũrmala, la version balte de la Côte d’Azur. Une plage de sable blanc très fin qui s’étire sur 32 kilomètres, des rues bordées de belles villas noyées dans la végétation, très fréquentée par les habitants de Riga toute proche. Du temps du communisme, c’est ici que la nomenklatura venait pour voir et être vue.
Étant donné l’absence de soleil, nous nous contentons d’une petite promenade sur le bord de mer et trempons un pied dans l’eau. Elle n’est pas froide mais le vent lui l’est.
Nous continuons vers l’ouest par une route qui s’enfonce dans l’immense forêt de pins. On ne croirait pas être si près du bord de mer. Plusieurs petits villages s’égrènent le long de la route. Des villages que l’on voit à peine, seul les panneaux 50 permettent de les repérer.
À Kolka, c’est un nid de cigognes qui nous émerveille. Quatre oiseaux s’y tiennent.
L’église est aussi intéressante avec sa couleur rouge et ses clochers.
Nous arrivons au cap Kolka qui ferme le golfe de Riga. La forêt de pins arrive jusqu’au bord de l’eau et les vagues grignotent lentement le bord, faisant tomber les pins les uns après les autres.
Le cap est un endroit où se rencontrent les eaux du golfe et celles de la pleine mer, provoquant des vagues et des courants.
Nous revenons à la voiture et décidons de pique-niquer sur place avant de continuer vers le sud, toujours le long de la côte. Sur la longue route quasi rectiligne qui mène à Ventspils, il y a un endroit insolite à voir. C’est le radiotélescope d’Irbene, construit par les Soviétiques dans les années 80 pour espionner les réseaux radios occidentaux. Il fonctionna jusqu’au retrait de l’Armée Rouge en 1994. Aujourd’hui, il est utilisé par les scientifiques du Centre International de radioastronomie de Ventspils pour capter les émissions radio venues de l’espace.
Une immense antenne parabolique de 32 m de diamètre et pesant 600 T est montée sur une base en béton haute de 25 m.
À un kilomètre de là, on longe les bâtiments où logeait le personnel travaillant sur cette base secrète de l’Armée Rouge. Des immeubles fantômes assez sinistres.
Ventspils est une grande ville portuaire. Son emplacement stratégique en zone libre de glace en fit une grande base navale et industrielle dès le 12° siècle avec les Coures, puis avec les chevaliers Porte-glaive au 13°, avec la Ligue Hanséatique au 16° et avec les Soviétiques plus récemment.
À côté des grues, des hangars et des quais, une magnifique plage de sable blanc s’étire sur 12 kilomètres adossée à une ligne de dunes. Quand il fait beau et chaud, la plage est, parait-il, très fréquentée, mais aujourd’hui, le soleil joue à cache-cache avec les nuages et un vents froid et très fort souffle en permanence.
Les températures de l’air et de l’eau sont affichées sur un moderne panneau d’affichage. 20° pour l’air et 19 pour l’eau.
Nous quittons le bord de mer pour revenir à l’intérieur des terres. Notre destination d’aujourd’hui est Kuldīga, petite ville située à une cinquantaine de kilomètres au sud-est de Ventspils.
À sa grande époque, de 1596 à 1616, Kuldīga fut la capitale du duché de Courlande mais elle souffrit énormément de la grande guerre du nord, ce conflit qui, de 1700 à 1721, vit s’affronter d’un côté la Suède et de l’autre une coalition comprenant la Russie impériale, le Danemark et la Prusse. Aujourd’hui, c’est une petite ville de 12s900 habitants connue dans la région comme la ville où le saumon vole.
Faute de camping, nous trouvons refuge à l’hôtel Métropole après une vaine tentative dans une auberge recommandée par le guide Lonely Planet.
La ville est célèbre pour son pont en briques dont les sept arches rouges permettent de franchir la Venta depuis 1874. Avec 154 m de long, c’est le troisième plus long pont de brique d’Europe.
Un peu en amont, la rivière est barrée par un ressaut rocheux de 2 m de haut sur toute la largeur de la rivière. Les 249 m de la Venta Rumba, tel est son nom, en font la plus large cascade d’Europe mais certainement pas la plus haute.
Au printemps, les saumons venus de la Baltique sautent pour passer ces chutes et gagner leurs zones de ponte en amont. Un spectacle très prisé parait-il.
Nous traversons les jardins municipaux impeccablement entretenus et décorés d’œuvres d’art diverses. De retour en ville, on peut admirer les vieilles maisons du centre et l’hôtel de ville et sa jolie façade jaune éclairés par le soleil bien bas sur l’horizon.
Face à la terrasse du restaurant où nous avons dîné, l’originale statue d’un écrivain local.
J 29 - Jeudi 18 juillet - KULDIGA - KLAIPĖDA 209 km
Nous revenons vers la mer par une agréable route qui traverse une campagne où se succèdent grands champs de céréales, fermes isolées et petits villages tranquilles. Nous nous arrêtons plusieurs fois pour photographier des scènes ou des sites qui nous ont plu, tel ce grand monument élevé à la mémoire d’un illustre inconnu à l’entrée d’un village, ou ce magnifique tilleul tout seul au milieu d’un immense champ de blé. Nous remarquons aussi le balisage particulier très visible d’un passage pour piétons, passages qui sont bien respectés par les automobilistes locaux.
Avant d’arriver à la station balnéaire de Liepãja, nous bifurquons pour aller visiter un endroit étonnant. C’est la petite ville de Karosta strictement interdite d’accès durant l’occupation soviétique car c’était une base navale qui englobait une bonne partie de la ville.
Les immeubles sans charme en béton sont la signature de l’urbanisme soviétique. Certains sont à l’abandon, d’autres ont été rénovés mais gardent malgré tout ce style inimitable.
Au milieu de la grisaille des immeubles décrépis, s’élève une apparition quasi miraculeuse, la cathédrale orthodoxe Saint Nicolas des Marins avec ses magnifiques bulbes dorés. Construite en 1901, elle a été pillée et fermée pendant la période communiste, transformée en hangar, en dépôt de munitions et n’a échappé à la démolition que par miracle. Restaurée dans les années 1990, elle a retrouvé de sa superbe.
Nous entrons. L’intérieur est moins pimpant que certaines autres églises orthodoxes où nous sommes entrés. Plusieurs femmes âgées, foulard sur la tête sont en train de balayer et de passer la serpillère. Les murs sont couverts d’icônes.
Cette ville est sinistre et pour enfoncer le clou nous allons visiter la prison. Le bâtiment fut construit en 1900 pour servir d’hôpital mais fut utilisé comme prison avant même d’être terminé. C’était une prison militaire qui servait à punir les soldats récalcitrants ou ayant commis des fautes aussi bénignes que sortir en ville sans permission. Elle fonctionna jusqu’en 1997, date où les troupes russes évacuèrent le pays.
Pour nous mettre dans l’ambiance, notre guide, une charmante jeune femme, nous traite comme si nous étions des prisonniers, nous fait mettre en rang par deux et marcher en gardant cette formation.
On avance dans les sinistres couloirs aux murs peints en noir.
Le bureau du commandant est bien restitué avec sa casquette posée sur le meuble, les drapeaux, des photos et les portraits des présidents de l’URSS, en commençant, petit rafraîchissement historique, par Vladimir Lénine (1922 - 1924), suivi de Joseph Staline (1924 - 1953), George Malenkov (1953 - 1955), Nikita Khrouchtchev (1955 - 1964), Leonid Brejnev (1964 - 1982), Youri Andropov (1982 - 1984), Konstantin Tchernenko (1984 - 1985) et Mikael Gorbatchev (1985 - 1991).
Notre guide nous regroupe dans une des cellules pour nous expliquer les conditions de vie des prisonniers puis nous enferme dans une cellule sans lumière, le noir absolu, où étaient enfermés pour une durée allant de quelques heures à 3 jours, les éléments particulièrement indisciplinés. Enfermés dans le noir, sans manger ni boire, ils devaient piétiner en cadence sur place sans s’arrêter pendant tout le temps où ils étaient enfermés. Nous avons droit à ce traitement, fort heureusement pendant quelques minutes seulement ! Puis nous ressortons de la prison au pas de course !
Une visite intéressante et pas aussi pesante qu’on pourrait le penser, peut-être grâce à la façon de faire de notre guide.
Après avoir pique-niqué sous les grands arbres dans les environs, nous rejoignons la ville de Liepaja, la grande station balnéaire qui a poussé à côté des installations portuaires, profitant d’une immense et magnifique plage de sable blanc ultra fin, longue de 8 kilomètres et large d’une centaine de mètres. Superbes villas souvent en bois donnant un petit air 19° siècle, allées fleuries, grand parc aux arbres majestueux, œuvres d’art éparpillées sur les pelouses impeccables, fontaines, tout est rassemblé pour le must de la Baltique. Malheureusement le vent froid qui soulève de petites vagues agressives et la disparition du soleil n’encouragent pas à la baignade.
Un grand monument dépasse de la ligne d’arbres. Nous nous en approchons pour voir de quel héros soviétique il s’agit. Surprise, c’est un mémorial pour l’équipage d’un avion patrouilleur américain abattu (probablement par un missile russe, mais ce n’est pas précisé) au large de la ville le 8 avril 1950. La liste des 10 membres d’équipage figure sur une plaque.
Nous repartons pour rejoindre notre ville étape du jour, Klaipėda, à environ 80 kilomètres au sud.
Klaipėda se trouve en Lituanie et nous prenons une photo souvenir au passage de la frontière plus une autre photo en sens inverse avec un groupe de jeunes locaux.
Quelques kilomètres plus loin, je suis arrêté par une voiture de police en embuscade. Le policier veut vérifier mes papiers et ceux de la voiture. Sans doute a-t-il remarqué ma plaque d’immatriculation différente de toutes les autres et a-t-il voulu savoir d’où je venais. Je m’étais déjà fait arrêter à Pãrnu en Estonie pour contrôle d’alcoolémie, chose qui ne m’était pas arrivé en France depuis des années !
Nous quittons le grand axe pour Palanga et son remarquable musée de l’ambre installé dans un somptueux palais néoclassique construit par le comte Feliksas Tiskevicius en 1897. Situé au centre d’un immense parc, il rassemble la sixième plus grande collection d’ambre au monde. Tout le sujet est abordé, depuis la formation de l’ambre il y a quelques millions d’années, sa découverte et les premières utilisations dès le néolithique, jusqu’aux extraordinaires bijoux contemporains réalisés par les meilleurs joailliers lituaniens. On peut observer à la loupe de magnifiques inclusions d’insectes figés dans la résine dorée depuis des temps immémoriaux.
À Klaipėda nous trouvons un studio dans une des pensions proposée par le guide Lonely Planet. Grande chambre, minuscule coin cuisine, parking fermé, nous voici à l’abri pour la nuit.
J 30 - Vendredi 19 juillet - KLAIPĖDA - ŠIAULIAI 304 km
Nous allons prendre le ferry pour passer sur l’isthme de Courlande.L’isthme de Courlande est une flèche littorale sablonneuse qui s’étire sur 98 kilomètres le long de la mer Baltique la séparant de la lagune de Courlande. Sa largeur varie de 400 mètres à 3,8 kilomètres. À l’extrémité nord, elle est séparée du continent par une étroite passe maritime de 500 mètres de large que l’on franchit en ferry depuis la ville de Klaipėda en Lituanie en à peine 10 minutes de traversée tandis que l’autre extrémité se rattache au continent dans l’enclave russe de Kaliningrad, la frontière se situant à peu près à la moitié.
La formation de l’isthme a débuté il y a quelques 5 000 ans par l’accumulation de sédiments sableux apportés par les fleuves, ces dépôts ayant constitué une bande de terre qui a émergé, séparant la mer de la lagune.
Plusieurs villages sont implantés sur l’isthme regroupés en la municipalité de Neringa, du nom d’une déesse antique qui, selon la légende, protégeait la population du littoral des tempêtes générées par le dragon Naglis.
Après avoir payé 30 € pour avoir le droit de circuler, nous roulons jusqu’à l’agglomération la plus au sud, Nida, située à trois kilomètres seulement de la frontière de l’enclave russe et continuons sur la route mais nous devons nous arrêter à la barrière qui signale le no man’s land, 1 kilomètre avant la frontière proprement dite. Impossible d’aller plus loin.
Nous nous garons et empruntons un sentier qui mène à la plage côté mer à travers la forêt de pins. Le sentier est pavé et bien signalé. Tout un réseau de chemins de promenade a été tracé dans la magnifique forêt de pins.
La plage est immense et vide, et la mer hérissée de vagues. Magnifique.
La plage est divisée en zones. D’un côté, la zone naturiste, de l’autre, la zone réservée aux femmes en maillot ! Bizarre.
Sans hésiter, nous allons du côté naturiste. De toute façon, il n’y a personne. Il fait soleil et un vent assez fort souffle de la mer. Je me décide, me déshabille et entre dans l’eau. Elle n’est pas si froide que ça. Sans doute 18 ou 19°. Un régal.
C’est le long de cette côte que l’ambre est récupérée, à la pelleteuse parait-il, dans l’enclave russe. Je ramasse des poignées de graviers là où les vagues déferlent et j’y trouve quelques minuscules grains d’ambre. Hourra !
Nous revenons au village de Nida, très joli avec ses fleurs, ses belles maisons colorées, certaines à toit de chaume. Haut lieu touristique de l’isthme, Nida, ancien village de pêcheurs, est devenu depuis longtemps un lieu de villégiature fréquenté par des personnalités. En 1965, Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir y séjournèrent, avec une autorisation spéciale de Khrouchtchev.
Le passé maritime de Nida et des autres villages de l’isthme est incarné par les nombreuses girouettes bien particulières qui décorent les toits des maisons. C’était un signe de reconnaissance qui fut imposé aux bateaux pêchant dans la lagune par une loi de 1844. Chaque village avait son propre symbole agrémenté de figures mythologiques permettant d’identifier les pêcheurs. Elles sont vite devenues un élément d’ornementation et on en trouve maintenant beaucoup un peu partout.
Au loin, vers le sud, la dune du paradis haute de 53 m, à la fois imposante et fragile, a, par le passé, enseveli des villages lors de son avancée, favorisée par les déforestations pratiquées au 16° siècle.
Un petit musée présente une maison de pêcheurs traditionnelle au 19°siècle. Un ensemble très joli avec les inévitables girouettes dans le jardin ainsi qu’une ancienne barque de pêche.
À la sortie du village qui s’étend sur 2 kilomètres, nous nous arrêtons voir l’église, à peine visible au milieu des arbres, et le cimetière.
Le cimetière est magnifique avec ses tombes éparpillées dans l’herbe rase sous de grands pins. Certaines tombes ont des croix, d'autres des formes géométriques, apparemment différentes pour les hommes et les femmes. Un endroit très agréable, très reposant.
La mer intérieure est aussi calme qu’un lac. Quel contraste avec les vagues de la pleine mer.
Nous revenons tranquillement vers le nord pour reprendre le ferry qui nous ramène sur la terre ferme.
Nous avons adoré l’isthme de Courlande, un endroit magnifique, reposant malgré le nombre important de vacanciers, avec ses jolis villages, ses agréables bois de pins parcourus de nombreux chemins de promenade et ses magnifiques plages désertes.
Près de Plateliai, nous allons visiter une ancienne base soviétique de missiles balistiques. Cette base était l’une des nombreuses bases dispersées sur tout le territoire de l’Union Soviétique. Elle était équipée de missiles à moyenne portée appelés R 12 par les Russes et SS 4 Sandal par l’OTAN, développés dès la fin des années 50 et produits en grandes quantités. Grâce à leur facilité d’entretien et à leur simplicité de mise en œuvre, ils restèrent en activité jusqu’en 1989.
Cette base bien évidemment entourée d’un important réseau de barbelés et probablement d’autres moyens d’interdiction, comptait 4 silos de lancement et un PC tir.
On descend dans le PC tir enfoui au milieu du quadrilatère formé par les 4 silos.
Poste de contrôle à l’entrée avec un impassible soldat soviétique.
Couloirs bas, portes blindées et étanches. Les différentes pièces sont aménagées en musée et présentent du matériel militaire russe sans lien avec les missiles nucléaires (missiles anti-aériens ou antichars, mitrailleuses, etc.). Dans une salle, une intéressante présentation de la crise de Cuba en 1962, dans une autre, des explications sur le déploiement des missiles russes.
Les murs de la salle de repos des soldats sont tapissés d'affiches de propagande.
Une inscription sur le mur rappelle des consignes de sécurité : masque à gaz - armement Gardez-les prêts à tout moment.Par un long couloir gardé par un soldat en tenue de protection NBC, on accède à l’intérieur de l’un des silos.
Bien sûr, la fusée a été enlevée depuis longtemps. Reste le trou profond de 25 m et d’une dizaine de mètres de diamètre.
On retrouve avec plaisir la lumière du jour et la chaleur du soleil.
Une visite intéressante mais pesante, oppressante.
Reste à rejoindre Šiauliai, notre étape du jour, à une grosse centaine de kilomètres. Arrivé sur place, nous avons du mal à trouver un hébergement car je n’ai rien réservé ici. Il n’y a pas de camping et le GPS fait des caprices pour trouver les adresses indiquées dans le guide. Bref on galère un petit moment avant de trouver un immense hôtel à l’allure stalinienne bon marché et qui a une chambre de libre. Parfait.
Une excellente journée grâce aux belles choses vues et au beau temps qui continue de briller.
J 31 - Samedi 20 juillet - ŠIAULIAI - KAUNAS 237 km
Avant de quitter la ville, il faut aller voir la colline des croix. En fait de colline, c’est juste un tas de terre de quelques mètres de haut au milieu de champs absolument plats à une vingtaine de kilomètres au nord de la ville. Mais c’est un endroit hautement symbolique, tout à la fois un lieu de pèlerinage et un symbole de révolte. Des centaines de milliers de croix de toutes tailles et de toutes formes sont plantées sur cette éminence, une tradition qui remonterait au soulèvement de 1831 et qui a connu son apogée dans les années 60 lorsque le pouvoir communiste interdisait la pratique de la religion. Les gens se glissaient pendant la nuit jusqu’à la colline pour y planter des croix malgré l’interdiction. Plusieurs fois les Soviétiques rasèrent la colline au bulldozer, ce qui ne découragea nullement les gens malgré la sévérité des peines encourues. Finalement, dans les années 80, les Russes abandonnèrent la lutte.
Comme dans tout bon site de pèlerinage, les marchands du temple ont investi les lieux et vendent souvenirs, boissons et autres ainsi que des croix pour tous ceux qui souhaiteraient en ajouter une.
Ici aussi, le pape Jean-Paul II est venu et a célébré une grande messe.
J’ai même repéré une coquille Saint Jacques, preuve que la via Regia vers Compostelle passe par là.
C’est un endroit étonnant et émouvant.
Nous repartons vers Kėdainiai par une belle route se glissant au milieu d’immenses champs de céréales qui s’étirent jusqu’à l’horizon.
De temps en temps, au sommet d’un poteau, on peut voir un nid de cigognes et on ne résiste pas au plaisir de s’arrêter et regarder un moment vivre ces oiseaux.
Kėdainiai est une petite ville tranquille construite au bord de la rivière Nevĕżis. Une vieille ville déjà mentionnée dans une chronique en 1372 et qui souffrit des guerres au 17° siècle.
On essuie un gros orage pendant notre promenade dans les rues et on doit s’abriter à la terrasse d’un café le temps que la pluie cesse. Sur la place du marché où nous arrivons, une noce sort de la mairie. Une originale statue trône en plein milieu. Appelé le coffre, elle honore Jonušas Radvila, grand commandeur du Grand-Duché de Lituanie au 17° siècle.
Nous arrivons dans la grande ville de Kaunas en milieu d’après-midi mais nous perdons du temps à chercher un camping qui n’existe plus et à trouver un hôtel qui puisse nous accueillir car nous n’avions rien réservé. Nous nous posons finalement au Babilonas, hôtel très agréable et situé dans un quartier très calme.
Kaunas serait née au 13° siècle et fut pendant au moins deux siècles un rempart contre les chevaliers Teutoniques à la frontière occidentale de la Lituanie. Construite à la confluence du grand fleuve Niémen et de la rivière Néris, elle devint une cité fluviale prospère et liée à la Ligue Hanséatique. Pendant l’entre-deux-guerres, Vilnius étant passé sous domination polonaise, elle fut la capitale de la Lituanie.
Nous descendons à pied au centre-ville où se concentre tout ce qui est à voir.
En premier, nous allons sur la grande place Rotušé, cœur historique de la ville, avec ses façades colorées, l’hôtel de ville qui se dresse en son centre avec des airs de cathédrale et quelques églises éparpillées tout autour.
Dans un coin, se dresse la statue de Jonas Maironis, prêtre catholique né en 1832 et le plus connu des poètes lituaniens, surnommé le barde du renouveau national. Dans ses poèmes, il exprimait les aspirations nationales. Un grand homme pour les Lituaniens, un parfait inconnu chez nous.
Devant la poste, une autre originale sculpture représentant, me semble-t-il, la fable de la cigale et de la fourmi.
Et encore un beau cadran solaire sur le pignon d’une maison.
Et puis, bien sûr, il y a le fleuve Niémen qui traverse la ville. Long de 937 kilomètres, il prend sa source près de Minsk en Biélorussie et se jette dans la lagune de Courlande près de Klaipėda en servant de frontière entre la Lituanie et l’enclave russe de Kaliningrad.
Ce fleuve est intimement mêlé à l’histoire européenne. C’est sur un radeau flottant sur le Niémen que le tsar Alexandre 1° et Napoléon signèrent le traité de Tilsit le 7 juillet 1807, traité qui définit un nouveau partage de l’Europe tout à l’avantage des deux empereurs évidemment. Et le 24 juin 1812, la Grande Armée le franchit, marquant ainsi le début de la campagne de Russie.
Près de la rive, encore une église, celle de Vytautas aussi appelée de l’Assomption de la Bienheureuse Vierge Marie, la plus ancienne de la ville, construite par les Franciscains au début du 15° siècle, devenue orthodoxe, puis utilisée comme dépôt de munitions par Napoléon avant de revenir tout récemment au culte catholique. Quelle carrière !
Le fleuve est traversé par le vieux pont Aleksoto qui, à une certaine époque, était le point de liaison entre l’empire russe et le royaume de Prusse. Or, les deux pays n’utilisaient pas le même calendrier, les Russes utilisant le calendrier orthodoxe décalé de 13 jours par rapport au calendrier occidental. Ainsi, lorsque l’on traversait le pont on arrivait de l’autre côté 13 jours plus tôt ou 13 jours plus tard.
J 32 - Dimanche 21 juillet - KAUNAS - OLSZTIN (PL) 237 km
Nouvelle journée de roulage qui nous fait repasser en Pologne. Belles routes et quelques tronçons d’autoroutes sous un grand soleil. Moins de forêts que d’habitude mais beaucoup d’étendues cultivées avec d’immenses champs de maïs et des champs de céréales. Les cigognes sont toujours présentes avec leurs nids au sommet des poteaux.
Le seul arrêt se fait en un lieu totalement inédit, peu connu et assez impressionnant, appelé la tanière du loup. C’était le QG secret d’Hitler caché au fond des forêts de l’ancienne Prusse Orientale. Initialement prévu pour diriger l’invasion de l’URSS, c’est l’ensemble des opérations de la Wehrmacht qui fut commandé à partir de là. Hitler y passa près de 3 ans et demi du 24 juin 1941 au 20 novembre 1944, entouré de près de 500 officiers, 1500 soldats et plus de 500 civils.
Une ligne de chemin de fer secrète permettait de se rendre sur place et un aérodrome à quelques kilomètres était aussi utilisé.
Ce QG était constitué de quelques maisons en bois et de plusieurs énormes bunkers édifiés hors sol. Rien n’était enterré.
Le complexe avait été démoli par les Allemands avant leur fuite devant l’avance de l’Armée Rouge mais les imposantes ruines des énormes bunkers aux murs épais de plus de 4 mètres, sont impressionnantes.
Des expositions sont aménagées qui présentent différents aspects de la 2° guerre mondiale.
On peut voir l’emplacement de la grande salle de réunion où Hitler recevait ses principaux adjoints et où eut lieu l’attentat raté du 20 juillet 1943. C’était une baraque en bois renforcé de murs de briques et de béton. On y voit une petite plaque en cuivre où des fleurs ont été déposées en hommage au Colonel Claus Schenk von Stauffenberg qui avait amené la serviette contenant la bombe et qui, bien sûr, fut exécuté le soir même.
Plus loin, dans un grand hangar, cette salle de réunion a été reconstituée avec des mannequins très bien faits. Hitler est représenté penché sur les cartes tandis que le colonel von Stauffenberg est en train de s’en aller.
Ambiance.
On suit un parcours dans la forêt qui nous emmène de bunker en bunker.
Après cette intéressante visite, il ne nous reste plus qu’à rejoindre la ville de Olsztyn où j’ai prévu de faire étape. Le camping que j’ai trouvé est perdu au bout d’un chemin de terre qui n’en finissait pas. Il est assez sommaire mais pour une nuit ça ira. Le terrain est bien, ce sont les sanitaires qui laissent un peu à désirer. Nous avons monté la tente à l’ombre de petits pins car il fait assez chaud.
Seul avantage, il est situé au bord d’un grand lac où je me suis baigné dans une eau agréablement tiède.
J 33 - Lundi 22 juillet - OLSZTYN (PL) - GDANSK 312 km
Le beau temps persiste.Avant de rejoindre Gdansk, j’ai prévu de passer voir trois sites intéressants.
Le premier est le canal Ostróda - Elbląg qui fut construit entre 1848 et 1876 pour relier la mer Baltique au sud de la Prusse. Il est long de 80 kilomètres mais seuls 40 kilomètres sont de vrais canaux creusés entre les 6 lacs de la région. Malheureusement, à peine fini, l’apparition du chemin de fer lui fit perdre toute rentabilité et il ne fut plus utilisé. Il ne fonctionne aujourd’hui qu’à des fins touristiques.
Pour franchir les dénivelés qui se présentent entre les lacs, des rampes inclinées relient les différents niveaux. Devant chaque rampe, les bateaux prennent place sur une sorte de chariot qui sort progressivement de l’eau, tiré le long de rails par un système mû par la force hydraulique. Pour équilibrer le dispositif, un bateau monte d’un côté pendant qu’un autre descend, les bateaux se croisant au-dessus de la terre ferme.
Le deuxième site est la petite ville de Frombork située au bord de la grande lagune séparée de la pleine mer par une étroite bande de terre. Son intérêt est que c’est dans cette ville que le grand savant astronome Nicolas Copernic passa la plus grande partie de sa vie et effectua l’essentiel de ses recherches depuis 1509 jusqu’à sa mort en 1543.
La petite ville un peu endormie est dominée par une charmante cathédrale fortifiée édifiée sur une colline surplombant la ville et la mer. En plus de ses qualités d’astronome, Copernic fut pendant trente ans l’un des chanoines de la cathédrale, ce qui lui valut l’honneur d’y être enterré.
Une fois la voiture garée à l’ombre de grands tilleuls, nous montons sur la colline de la cathédrale par le chemin qui longe l’enceinte.
Nous arrivons devant l’entrée, impressionnante tour massive qui se trouve à l’opposé de la ville.
À l’intérieur de la grande cour, un énorme chêne envoie ses frondaisons largement au-dessus des remparts. Nous commençons par le musée Copernic installé dans l’ancien palais épiscopal. Tout le premier étage est dédié au savant. On y trouve entre autres documents, un fac-similé du fameux traité de Copernic, tout en latin, le De revolutionibus orbium coelestium.
Cette cathédrale entourée de remparts fut construite entre 1329 et 1388 et présente une façade flanquée de tourelles que l’on retrouvent du côté du chœur.
Les murs blancs de deux chapelles ajoutées ultérieurement tranchent sur le rouge sombre de l’ensemble de l’édifice.
La nef est dominée par une voûte en étoile rayonnante et possède une vingtaine d’autels baroques appuyés aux piliers ainsi qu’une bonne centaine de pierres funéraires où reposent évêques et chanoines.
Copernic repose lui aussi dans la cathédrale sous l’une des dalles mais personne ne sait laquelle. Dommage.
Le magnifique retable représentant la Vierge qui se trouvait autrefois derrière l’autel a été transféré dans une chapelle latérale.
Les grandes orgues sont réputées pour leur sonorité et grâce à l’excellente acoustique du lieu permettent de donner de magnifiques concerts. Les claviers de l'orgue sont installés dans la nef et non au pied de l'instrument. C'est une occasion rare de les photographier.
Sur l’un des piliers, une épitaphe à Copernic, l’homme "qui a arrêté le soleil et fait tourner la Terre".
Parmi les tours de l’enceinte, deux sont intéressantes. La tour Copernic, bâtie avant 1400, plusieurs fois détruite et reconstruite, est supposée avoir été le cabinet de travail et l’observatoire céleste du savant.
Quant à la tour Radziejowski, c’est un ancien clocher dans lequel un planétarium a été aménagé dans les sous-sols et un pendule de Foucault installé dans le corps de la tour. Autre intérêt, la possibilité de monter jusqu’à une galerie extérieure d’où le panorama sur la grande lagune de la Vistule est magnifique.
Sur la route nous menant à Elbląg, nous voyons un nouveau panneau concernant les élans. Celui-ci permet de se rendre compte de la taille de l’animal.
Le troisième site à voir est le château de Malbork, autrefois connu sous le nom de Marienburg. Il fut la résidence des grands maîtres de l’Ordre des Chevaliers Teutoniques avant de devenir leur capitale de 1308 à 1457. Cette immense forteresse de briques rouges couvrant 21 hectares est le plus grand château médiéval d’Europe. Le lundi, les visites sont gratuites et on dispose d’un audioguide très bien fait qui permet de bien suivre l’histoire du château. Trois châteaux en un en fait, l’avant-château avec l’arsenal et une église, le château moyen où avaient lieu les activités séculaires et les échanges avec l’extérieur et le château haut exclusivement réservé aux membres de l’Ordre. On se perd rapidement dans la triple enceinte de remparts, les nombreuses tours, les pont-levis et les fossés, les cours et les escaliers et l’on a l’impression que l’on ne sortira jamais de ce labyrinthe.
Dans l’une des cours du château, les statues de quatre des grands maîtres de l’ordre des Chevaliers Teutoniques, Hermann von Salza, Siegfried von Feuchtwangen, Winrich von Kniprode et Albrecht Hohenzollern, s’imposent aux visiteurs, un peu à la manière des Chevaliers de la Table Ronde en d’autres lieux.
On parle beaucoup de ces fameux Chevaliers Teutoniques. Qui étaient-ils ?
C’était un ordre militaire créé vers 1127 dans le cadre des Croisades en Terre Sainte mais plus connu pour ses croisades dans les pays baltes et la Prusse.
S’inspirant de l’Ordre de Jérusalem et des Templiers, il soignait les pèlerins germaniques blessés ou malades tout en faisant la guerre pour défendre la chrétienté. Composé essentiellement de chevaliers allemands, il se dota peu à peu d’une force militaire importante.
Les croisades baltes commencèrent en 1229. Petit à petit, les Chevaliers envahirent la Prusse et les provinces baltes, créant des villes, fusionnant avec l’Ordre des Porte-Glaives, tentant même de conquérir la Russie orthodoxe, sans succès. En 1311, ils prirent le contrôle de la Poméranie et de Danzig et continuèrent leurs conquêtes, mais l’union du royaume de Pologne en 1386 avec le Grand-Duché de Lituanie menaça leur suprématie dans la région. En 1410, cette nouvelle coalition écrasa l’armée des Chevaliers à la bataille de Tannenberg et en 1466, à l’issue de la guerre de Treize Ans, l’ordre devint vassal de la Pologne, ne se releva plus jamais et perdit graduellement de son importance.
Il ne nous reste plus qu’à rejoindre la grande ville portuaire de Gdansk à environ 70 kilomètres de là.
Le ciel qui se couvrait de plus en plus depuis la fin de matinée a fini par cracher une pluie intense qui nous a accompagné jusqu’à l’arrivée.
Nous faisons étape dans un hostel très bien situé au bord d’un bras de la rivière Motława qui traverse la ville. Le centre est juste sur l’autre rive. Un bel hostel bien aménagé, très propre et où l’accueil est agréable. Nous y disposons d’une chambre sous les toits avec vue sur une des tours de l’enceinte de la vieille ville.
J 34 - Mardi 23 juillet - GDANSK
La journée est consacrée à la visite de la ville.Ce prospère comptoir de la Ligue Hanséatique rasé par les bombardements pendant la seconde guerre mondiale a retrouvé sa superbe après une minutieuse reconstruction à l’identique des maisons à pignons, des façades couvertes de fresques, des grands édifices tels que la cathédrale ou l’hôtel de ville. Une atmosphère particulière règne ici, peut-être parce qu’il s’agit d’une ville portuaire. D’ailleurs n’est-elle pas surnommée la perle de la Baltique ?
Nous traversons les ponts qui enjambent les bras de la Motława et arrivons immédiatement à la Porte Verte, bâtie au 16° siècle en remplacement d’une porte défensive. C’était en fait un palais destiné à la cour royale lors de ses visites dans la ville. Sur un poteau, une coquille Saint Jacques du chemin de Compostelle me nargue.
De l’autre côté, on débouche sur Długi Targ, le long marché, élargissement de la rue Długa, bordé des belles façades des maisons des grands négociants et dominé tout au fond par le beffroi de l’hôtel de ville.
Je ne suis pas le seul à prendre des photos, témoin cette belle chevelure typiquement polonaise à l’œuvre.
Au bout de la place, s’élève la très jolie fontaine de Neptune construite en 1633, surmontée d’une statue en bronze de la divinité. Neptune symbolise le lien étroit liant la ville à la mer.
Derrière elle, la splendide façade blanche de la Cour d’Artus, lieu de réunion de 6 corporations bourgeoises, bâtie entre 1476 et 1481. Son nom évoque les Chevaliers de la Table Ronde auxquels les riches négociants s’identifiaient bien volontiers avec leur fonctionnement démocratique.
Elle reçut en 1616 une remarquable façade maniériste où l’on peut voir les statues de Scipion l’Africain, Thémistocle, Marius Camillus et Judas Maccabée, surplombées sous la balustrade sommitale des allégories de la Force et de la Justice, la déesse Fortune dominant l’ensemble du haut du fronton.
À gauche, la porte menant aux caves est surmontée d’une coupole coiffée d’une statue de Mercure, saint patron des marchands.
Le long marché et la rue Długa forment la voie royale, artère centrale de la ville, sur laquelle paradaient les rois de Pologne en visite officielle à Gdansk.
La rue commence à la porte haute, édifiée en 1574 comme poste avancé des fortifications médiévales. C’est là que le roi recevait les clés de la ville.
En avant de cette porte, on trouve l’avant-porte, une sorte de barbacane qui abritait la prison de la ville.
L’hôtel de ville se dresse le long de la rue Długa. On voit de loin sa longue flèche coiffée de la statue dorée du roi Sigismond II Auguste qui toise la ville du haut de ses 82 m.
Au cours de la visite, plusieurs grandes salles se parcourent. Il y a la grande salle du Conseil aussi appelée Salle rouge à cause de la couleur des murs et qui est l’endroit le plus important du bâtiment. La décoration date de la fin du 16° et du début du 17° siècles. Les peintures des murs et du plafond présentent la ville de Gdansk comme une ville bien gérée et protégée par la providence. En particulier, la grande peinture du plafond baptisée "l’apothéose de Gdansk".
On peut grimper à la tour. On est récompensé de la montée des 300 marches par un panorama splendide sur toute la ville. On domine aussi la basilique Notre-Dame.
Avec 105 m de long, 68 de large et 29 m de haut, la basilique Notre-Dame est l’une des plus grandes églises en briques au monde. En volume, elle serait équivalente à Notre-Dame de Paris et peut accueillir 25 000 personnes. Sa construction demanda 159 ans, de 1343 à 1502, en partie à cause de la nécessité de l’édifier sur des centaines de pilotis en chêne plantés dans le sol marécageux. Comme le reste de la ville, elle souffrit de la guerre mais la plupart de ses trésors furent sauvés.
Bien que l’église soit catholique après avoir été protestante, la nef toute blanche permet de bien mettre en valeur quelques merveilles.
Dans le transept nord, une chapelle abrite la Madone de Gdansk datant de 1420, une magnifique Vierge portant l’enfant, toute habillée d’or.
Le maître-autel est dominé par un superbe triptyque gothique de la fin du 16° siècle représentant le couronnement de la Vierge. Derrière lui, un immense vitrail éclaire le chœur.
Au centre de la nef, les fonds baptismaux en pierre noire et entourés d’une série de statues représentant les apôtres attirent l’attention.
Les grandes orgues baroques installées au fond de la nef sont somptueusement décorées de nombreuses statues et de petits bas-reliefs polychromes représentant des scènes de la vie de Marie.
Le tableau du Jugement Dernier du peintre brugeois Hans Memling était originellement destiné à l’église de Fiesole à Florence mais, en 1473, le corsaire von Danzig arraisonna le bateau le transportant, s’empara du tableau et l’offrit à la cathédrale Notre-Dame, ce qui entraîna quelques complications diplomatiques, le pape menaçant même de jeter l’interdit sur la ville. Plus tard, Napoléon le subtilisa et le déposa au Louvre où il resta jusqu’en 1815. Après la 2° guerre mondiale, il fut transféré au musée de l’Ermitage à Léningrad. Ce n’est que depuis 1956 qu’il est enfin revenu à Gdansk.
Et, pour terminer, on ne peut pas rater l’extraordinaire horloge astronomique réalisée entre 1464 et 1470, de 14 m de haut, équipée de 6 mécanismes indépendants qui donnent l’heure, le jour, le mois, l’année, les phases de la Lune et la position du Soleil et de la Lune par rapport au calendrier des saints et des signes du zodiaque. En haut, Adam et Ève sonnent les heures en tapant sur la cloche accrochée au cou d’une femme serpent.
Nous parcourons ensuite la rue Mariacka qui mène au fleuve, ce qui nous permet de voir le cadran solaire installé sur le clocher de l’église, quelques drapeaux de la ville de Gdansk accrochés à une façade et, dans un magasin de souvenirs où j’ai acheté un T-shirt de la ville, une étonnante poupée représentant Lech Walesa et sa grosse moustache.
En passant la porte Sainte Marie, nous débouchons sur le long quai qui borde la Motława. Il est bordé de belles maisons bourgeoises aux façades de brique.
Le quai est dominé par la majestueuse silhouette de la grue médiévale en bois qui servait jadis au chargement et déchargement des marchandises. Elle existait en 1367, fut reconstruite après un incendie en 1444, et reçut une grue supérieure au 17° siècle qui soulevait jusqu’à 2 T et permettait l’installation des mâts sur les navires.
Le treuil était actionné par deux roues tambours en bois dans lesquelles des hommes, tels des hamsters, faisaient tourner l’ensemble en montant inlassablement les marches. Très endommagée pendant la guerre, elle fut restaurée entre 1955 et 1962.
De l’autre côté du bras d’eau, sur l’île aux greniers, s’élève le grenier royal, seul rescapé des destructions de la guerre.
Nous marchons jusqu’au bureau des postes qui fut attaqué par les nazis le 1° septembre 1939. Une cinquantaine de postiers polonais le défendit quatorze heures durant. Quatre employés réussirent à s’échapper, les 35 rescapés furent fusillés et leurs corps jetés dans une fosse commune. Cet épisode est raconté dans le roman "Le tambour" de Günter Grass, adapté au cinéma.
Tout à côté, un monument a été élevé en souvenir de cette action héroïque.
Nous allons ensuite voir l’église Sainte Brigitte toute proche, édifiée en 1396 pour abriter la dépouille de la sainte. Complètement détruite pendant la guerre, elle fut reconstruite au début des années 70 avec une décoration plus moderne dont un magnifique autel en ambre.
Elle devint le sanctuaire du syndicat Solidarność lors des fameuse grèves de 1980 après que les ouvriers grévistes s’y soient réfugiés. Encore un endroit où le pape Jean-Paul II est venu en visite au moment des grèves.
Dans la nef, on peut voir une épitaphe consacrée aux victimes de l’accident d’avion survenu le 10 avril 2010 aux environs de Smolensk. Le Tupolev 154 transportait une délégation polonaise de 94 personnes comprenant le président de la république, le chef d’état-major des armées, d’autres hauts responsables du pays et des familles des victimes qui se rendait à Katyń à l’occasion du 70° anniversaire des massacres.
Et bien sûr, on ne peut pas venir à Gdansk sans penser aux chantiers navals, à Lech Walesa et à Solidarność. Le monument érigé en souvenir des évènements se voit de loin.
Nous marchons jusqu’à l’entrée des chantiers navals, où quelques bannières aux couleurs de Solidarność flottent au vent.
Le magnifique musée donne l’impression d’être dans un immense navire en construction. Toute la chronologie des évènements qui conduisirent finalement à la chute de l’URSS sont remarquablement expliqués avec de nombreuses photos et vidéos authentiques. Un émouvant retour sur cette période clé de l’histoire de la Pologne.
Sur le retour, nous passons près des Halles au magnifique fronton et de la tour Hyacinthe voisine.
Nous revenons vers notre hostel en repassant par les belle rues du centre éclairées par un brillant soleil couchant.
Dernières images de cette belle ville.
Même notre hostel paraît superbe sous cet éclairage.
J 35 - Mercredi 24 juillet - GDANSK - POZNAŃ - SWIEBODZIN 436 km
Nous quittons Gdansk sous un ciel gris et prenons la direction du sud.Première halte à Pelplin où se dresse une étonnante église ayant rang de cathédrale, construite toute en briques entre 1280 et 1320. Elle faisait partie d’une abbaye cistercienne fondée en 1274 par le duc de Poméranie. Elle surprend par ses dimensions colossales et sa magnifique voûte gothique.
L’aménagement intérieur est somptueux. Un magnifique maitre-autel Renaissance de 1623 se dresse dans le chœur et on ne trouve pas moins de 20 petits autels adossés aux piliers, tous plus décorés les uns que les autres.
Un grand orgue est installé au-dessus de l’entrée et un organiste jouait quand nous sommes entrés, emplissant l’église d’une musique envoutante.
La décoration est poussée dans le moindre détail, tel la statue qui supporte la chaire ou les pieds des voussures de la voûte décorés d’une tête grimaçante.
À l’extérieur, sous les arbres du parc, nous découvrons une pierre qui est en fait un mémorial pour les 600 soldats de la Grande Armée tués lors des combats de Poméranie en 1807. L'inscription est faite en plusieurs langues dont le français, ce qui n'est pas très courant dans cette région.
L’autoroute où la circulation est très faible nous amène rapidement à Toruń, notre deuxième destination.
Située sur la rive droite de la Vistule, blottie dans ses remparts, ancien port de la Hanse, Toruń est une ville agréable dont la partie ancienne se serre autour de son Rynek où la massive silhouette de briques rouges de son hôtel de ville dépasse largement des toits. Mais elle est surtout la ville de naissance de Copernic et nous nous empressons d’aller visiter sa maison familiale bien évidemment transformée en musée. Une maison cossue car le père de Nicolas était un riche commerçant de la ville.
Sur la place de l’hôtel de ville une grande statue du savant a été érigée. Sur le socle, la fameuse phrase en latin attribuée au naturaliste et géographe Alexandre von Humboldt : "Nicolas Copernic de Toruń, a mis la terre en mouvement et arrêté le soleil et les cieux".
Nous nous promenons ensuite dans la ville, passons près des remparts et de la tour penchée.
Nous franchissons la porte des bateliers qui donne sur le fleuve.
De l’autre côté, la Vistule coule nonchalamment, enjambée par plusieurs ponts dont celui que nous avons emprunté en arrivant.
Le château des Chevaliers Teutoniques est complètement en ruines et mérite à peine le coup d’œil.
Malgré le temps nuageux de ce matin et les prévisions de pluie de la météo, nous avons la chance de faire cette visite sous le soleil. C’est plus loin, alors que nous roulons en direction de Poznań après avoir pique-niqué dans les bois, qu’une grosse pluie d’orage s’abat sur nous mais, à nouveau, elle a cessé lorsque nous arrivons à destination retardés par un accident à la sortie de l’autoroute.
Poznań est une grande ville très animée et très agréable. Avec ses nombreux magasins et beaucoup de jeunes, elle fait une excellente impression. Pour le touriste c’est facile, tout est concentré autour du Rynek, la place du marché bordée de belles maisons.
Le Rynek est un carré au sol pavé dont le centre est occupé par l’hôtel de ville dont la façade hérissée de clochetons est dominée par un haut beffroi.
Plusieurs statues agrémentent la place, notamment celle de l’enlèvement de Proserpine et la Bamberka.
La première illustre cet épisode de la mythologie grecque où Proserpine appelée aussi Perséphone, fille de Zeus et de Demeter, fut enlevée et amenée dans les Enfers par le dieu Hadès. Après l’intervention de sa mère Demeter et celle d’Hélios, le soleil, il fut décidé que Perséphone passerait 8 mois par an sur terre et 4 mois aux Enfers où elle serait la reine des morts.
La Bamberka est là pour rappeler qu’une partie de la population de la ville est originaire de la ville allemande de Bamberg, située dans le nord de la Bavière. Ils furent invités à venir s’installer dans les villages de la région désertés après les ravages de la grande guerre du nord et une épidémie de peste. On les appelait les bambers et ils furent rapidement assimilés dans la communauté locale.
J’avais prévu de faire étape dans cette ville mais pour diminuer quelque peu la longueur des deux étapes suivantes, nous décidons d’avancer et de nous arrêter lorsque nous trouverions un hôtel pour la nuit. Finalement, je quitte l’autoroute 90 kilomètres plus loin et rejoins la petite ville de Świebodzin où nous trouvons un hôtel accueillant.
J 36 - Jeudi 25 juillet - SWIEBODZIN - FREIBURG (DE) 928 km
Il fait beau ce qui aidera à parcourir cette longue étape. L’autoroute polonaise est quasiment vide et la circulation est faible sur l’A9 allemande. Nous passons au sud de Berlin, puis descendons vers Leipzig avant de bifurquer vers l’ouest sur l’A6 en direction d'Heilbronn.
Nous rencontrons quelques ralentissements mais ils ne durent pas longtemps.Arrivés à la vallée du Rhin, nous rattrapons l’A5 qui descend vers Karlsruhe et Basel. Bien qu’il ne soit que 18h30, nous décidons de nous arrêter. L’occasion se présente avec un panneau annonçant un hôtel à la prochaine sortie à Grafenhausen, quelque part entre Offenburg et Fribourg.
Nous y allons. L’Europe Hotel a encore de la place et est agréable et confortable. Pour dîner, nous marchons jusqu’au restaurant Die Engel à l’autre bout du village. Marche apéritive puis marche digestive !
Au retour, je vais laver la voiture à la station-service en face de l’hôtel. Elle en avait vraiment besoin.
Une bonne journée où nous avons parcouru facilement 928 kilomètres.
J 37 - Vendredi 26 juillet - FREIBURG (DE) - MONTPELLIER 737 km
Dernière journée de roulage. Le beau temps est avec nous et facilite les choses. Autoroute A5 jusqu’à Mülheim et traversée du Rhin à hauteur de Mulhouse. Les autoroutes A36 puis A39, A40 et A42 nous amènent facilement jusqu’aux abords de Lyon. C’est là que les choses se gâtent car le contournement de Lyon puis l’A7 dans la vallée du Rhône sont très chargés. Ralentissements et bouchons se succèdent si bien que nous mettons 6 heures pour faire Lyon Montpellier.La température a aussi bien augmentée, passant de l’agréable 19° au départ le matin, à l’étouffant 35° du Languedoc.
Il est 18 h quand nous arrivons chez nous un peu fatigués et contents de retrouver notre appartement ainsi que notre fille Lisa, Mikael et notre petit-fils Marlon qui sont là depuis une semaine.
Voilà un beau voyage qui vient de se terminer. Il nous a fait découvrir une partie de l’Europe complètement méconnue chez nous.
Nous avons complété notre connaissance de la Pologne et pris vraiment conscience du terrible épisode du ghetto de Varsovie et des destructions subies par le pays et sa capitale.
Nous avons passé un agréable séjour dans les montagnes des Sudètes et avons beaucoup aimé parcourir la campagne polonaise. Nos meilleurs souvenirs sont les visites de Varsovie et de Gdansk pour leurs magnifiques centres anciens parfaitement reconstruits et leur ambiance jeune et dynamique, la visite de la tanière du loup, le QG secret d’Hitler caché dans les forêts de Prusse orientale tandis que le passage à Frombork a été l’occasion de raviver nos connaissances sur Nicolas Copernic.
Les trois pays baltes nous ont beaucoup plu. Ce sont des pays faciles à vivre, jeunes, tranquilles, à l’excellent niveau de vie et où les capitales ont beaucoup à offrir. Laquelle de Vilnius, Riga ou Tallinn est la plus belle ? Chacune a son style particulier, mais elles sont toutes les trois magnifiques avec leurs vieilles villes pittoresques et leurs colossales églises de briques. Nous avons aimé les trois avec, peut-être, une légère préférence pour Riga.
On pourrait croire que traverser des pays absolument plats est ennuyeux mais il n’en est rien tant les immenses forêts et les grands espaces cultivés sont reposants et ponctués de jolis villages aux pittoresques maisons de bois, de petites fermes où flotte le drapeau du pays, signe tangible de la grande fierté nationale, et parsemés de ces sympathiques nids de cigognes perchés sur des pylônes que l’on ne peut s’empêcher d’admirer.
Druskininkai, le château de Trakai, Grütas Park et ses impressionnantes statues des grands personnages de l’URSS, l’émouvante colline des croix à Šiauliai, les éblouissantes églises orthodoxes de Vilnius, Daugavpils, Pühtitsa, Tallinn ou Pãrnu, les paysages tranquilles, les moulins à vent et les phares des îles de Hiiumaa et Saaremaa, la paisible petite ville de Kuldīga avec son pont et sa cascade, et tant d’autres sites intéressants nous ont vraiment plu, parfois ému.
Nous avons été impressionnés par les reliques de l’époque soviétique toujours visibles, telles la centrale atomique d'Ignalina, la ville de Sillamäe, le radiotélescope d’Irbene, la base navale de Karosta et surtout la base de missiles balistiques de Plateliai.
Nous avons adoré l’isthme de Courlande, ses mignons villages, ses forêts de pins, ses dunes et ses immenses plages de sable quasi vides ouvrant sur une mer Baltique vivifiante, un endroit magique, très fréquenté mais donnant malgré tout l’impression d’être coupé du monde. Nous aurions dû y rester plus longtemps…
Nous avons été favorisés par un beau temps quasi permanent et des températures raisonnables, ni trop chaudes ni trop froides.
Quelque chose que nous avons beaucoup aimé aussi, ce sont les ciels très clairs et très bleus parsemés de beaux nuages blancs, chose que nous voyons rarement chez nous.
Circuler ne pose aucun problème car les routes sont belles, bien signalées, et les Baltes conduisent "sagement", respectant dans l’ensemble les limitations de vitesse identiques aux nôtres. Nous avons rencontré très peu de tronçons non goudronnés uniquement sur des petites routes de campagne que nous avions empruntées pour couper au plus court, où il était quand même possible de rouler presqu’aussi vite qu’ailleurs.
Ce voyage nous a fait prendre conscience des horreurs subies par les habitants des trois pays pendant les 47 ans passés sous la domination soviétique. Ce fut la période la plus noire de leur histoire pourtant marquée par de nombreuses guerres. Même pendant l’occupation allemande, nous n’avons jamais connu en France une telle oppression. Pendant 47 ans, ils ont été privés de ce qui, pour nous Français, paraît partie intégrante de notre société, la liberté, la tranquillité, la paix. Cela devrait nous faire ouvrir davantage les yeux sur ce qu’il se passe en Ukraine et la possibilité redoutée par les Baltes d’être les suivants sur la liste.
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